Dans un précédent article, nous donnions le contexte autour du RGESN et de la loi REEN : https://greenspector.com/fr/rgesn-loi-reen-de-quoi-parle-t-on/
“ L’auto-évaluation est un principe clé. Un regard extérieur est source d’éclaircissement et d’identification de points d’amélioration”
Depuis l’arrivée de la dernière version du RGESN en mai 2024, les retours se multiplient, de même que les audits. Chez Greenspector, nous avons accompagné plusieurs projets avec audits RGESN (une douzaine environ sur la V1 2024). Récemment, nous avons également pu proposer des revues critiques d’audit afin de mettre à profit l’expérience accumulée sur le référentiel. Le but sur de telles prestations est de porter un regard extérieur sur l’audit réalisé et de vérifier ou éclaircir certains critères.
“Une base de déclarations pour monter en compétences et apprendre sur ce référentiel et sur sa mise en place”
Les déclarations RGESN sont actuellement centralisées sur une seule page (qui est régulièrement mise à jour) : https://ldevernay.github.io/green/2024/09/02/rgesn.html A terme, il est prévu que l’ARCEP mette à disposition un site reprenant cette fonction (ainsi que d’autres visant à faciliter l’adoption du référentiel).
Si vous avez repéré une déclaration qui ne s’y trouve pas, n’hésitez pas à la transmettre sur le site.
Plusieurs sujets seront explorés ici :
Comment industrialiser le référentiel via plusieurs axes : l’amélioration continue sur un projet, la prise en charge de plusieurs services numériques et les futures évolutions du référentiel proprement dit.
Le RGESN s’impose comme un excellent outil pour évaluer l’écoconception d’un service numérique mais aussi pour structurer la démarche d’écoconception.
Si l’audit prend place dès le début de la création d’un service numérique, il sera d’autant plus impactant.
“Initialement, sur la méthodologie d’évaluation RGESN, on s’est trompés pour vous !”
Sur les précédentes versions du RGESN, nous avions opté pour des audits “descendants” :
Toutefois, à l’usage, il est vite apparu que cette approche n’était pas la meilleure.
Nous avons donc opté pour quelque chose de plus participatif afin d’améliorer l’implication de nos interlocuteurs et de faciliter leur montée en compétence.
“Il a été crucial de renforcer l’usage des mesures afin d’aller vers des éléments factuels et d’amorcer la démarche d’amélioration continue «
Les mesures sont indispensables pour certains critères et souhaitables pour d’autres. De toute façon, mesures ET bonnes pratiques sont indispensables et indissociables pour une démarche d’écoconception, notamment via l’amélioration continue. Nous avons déjà exploré ce sujet ici : https://greenspector.com/fr/greenspector-studio-et-rgesn/
« Repenser l’offre d’accompagnement pour mieux intégrer le RGESN”
Chez Greenspector, nous structurons donc désormais l’audit RGESN autour d’ateliers (dont l’ordre peut être modifié).
Une première session avec toutes les parties prenantes identifiées :
En parallèle de cette démarche, plusieurs de nos offres d’accompagnement ont été repensées afin de s’articuler autour du RGESN, notamment l’offre Ecobuild.
Les audits et revues critiques nous ont permis de recueillir de nombreux retours sur le référentiel et sa mise en place.
Cet atelier repose sur deux volets :
“Lister tout ce qui est attendu du référent pour que chacun comprenne son propre rôle dans la démarche”
Ainsi, à titre indicatif, nous avons pu identifier avec certains de nos clients les missions suivantes :
Objectifs et KPI | Contribuer à leur définition |
S’assurer qu’ils soient connus et partagés dans les équipes | |
Garantir leur suivi | |
Assurer leur reporting | |
Définir et programmer des revues de conception et de code | |
Définir et faire respecter le budget environnemental | |
Inscrire la démarche dans la durée (amélioration continue) | |
Sensibilisation – Formation | Sensibiliser l’ensemble des équipes à l’écoconception de services numériques |
Recueillir les interrogations de tous sur l’écoconception | |
Communication | Communiquer en interne et en externe sur les succès (gains), réalisations et retours d’expérience |
Faire le lien entre les parties prenantes | |
Définir les attentes en termes d’écoconception auprès des fournisseurs (hébergement, etc) | |
Se synchroniser avec les autres référents écoconception de la structure voire avec les référents sur les autres sujets du Numérique Responsable (accessibilité, données personnelles, etc). | |
Valoriser la démarche auprès des clients | |
Veille | Suivre l’évolution des techniques, de la réglementation et de la mesure |
Partager la veille | |
Certifications et normes | Rédiger la déclaration d’écoconception |
Assurer le suivi et la maintenance de la grille d’audit et de la déclaration d’écoconception | |
Faire passer les labels et certifications et les maintenir |
“La transparence est indispensable mais peut être perçue comme un frein voire un risque”
De prime abord, certains critères sont difficiles à interpréter ou à comprendre. Du côté des auditeurs, il apparaît donc nécessaire de les expliquer voire, parfois, de prendre parti afin de pouvoir les évaluer. En effet, faute parfois d’un cadre précis de validation, il peut s’agir de valoriser les efforts réalisés plutôt que le résultat.
En tant qu’auditeur, certaines informations s’avèrent souvent difficiles à obtenir. En particulier, celles relatives aux services-tiers et prestataires (notamment pour l’hébergement).
En ce qui concerne la signature ou non du code de conduite européen, les informations sont directement disponibles en ligne : https://e3p.jrc.ec.europa.eu/en/groups/data-centres-code-conduct/participants
En revanche, en particulier pour les principaux fournisseurs de cloud (Azure, AWS, etc), certaines données ne sont pas publiques. Pour d’autres (PUE, WUE), le périmètre et le mode de calcul devraient être précisés (surtout que des normes ISO existent à ce sujet). Ainsi, on constate parfois que les valeurs annoncées ne sont pas réalistes. Il reste à souhaiter que, dans un futur proche, les hébergeurs puissent fournir directement sur leurs sites web respectifs les informations nécessaires pour l’audit RGESN. Pour peu que le référentiel fasse l’objet d’obligations légales, ceci pourrait devenir un facteur différenciant lors du choix d’un hébergeur pour un service numérique.
Un souci récurrent (et plus général pour les démarches d’écoconception) est le manque de temps pour les parties prenantes. Il n’y a malheureusement pas de solution miracle à ce propos. L’audit RGESN, tout comme la démarche d’écoconception, nécessite du temps et des moyens pour être mené à bien. À l’usage, les ateliers dédiés à chaque famille de critères s’avèrent bénéfiques car ils permettent de récupérer directement la plupart des informations mais aussi de définir ce qui est attendu de chacun.
Enfin se pose la question de la transparence. Il peut être délicat d’inclure certaines informations sensibles dans la déclaration (par exemple pour des raisons de sécurité ou de confidentialité). De même, certains clients craignent d’être accusés de greenwashing.
Vous pourrez par ailleurs découvrir des retours d’expérience chez Temesis :
Et chez Lunaweb :
Considérations générales sur l’audit et les déclarations
“Mesurer l’avancement pour savoir où l’on va”
Parlons ici d’une ambiguïté récurrente qui peut sembler anodine. Très souvent, les déclarations basées sur le RGESN mentionnent un score de conformité. Or, il s’agit bien d’un score d’avancement. La nuance peut sembler subtile mais a son importance : en effet, il ne s’agit pas tant d’évaluer la conformité d’un service numérique au référentiel mais d’évaluer la progression de la démarche d’écoconception, dans une optique d’amélioration continue.
Le référentiel repose beaucoup sur du déclaratif. C’est plutôt logique lorsqu’on évalue une démarche et parce qu’il est quasiment impossible de définir de façon universelle des indicateurs mesurables et les seuils associés. On constate toutefois que, dans certains audits, certaines justifications sont… disons discutables. C’est aussi cette part d’interprétation qui fait que le score obtenu ne peut pas être un score de conformité. Il est possible que, en gagnant en maturité via les démarches d’audits, les critères du RGESN perdent de plus en plus en incertitude.
Plus généralement (et de façon systématique) un score d’avancement élevé est souvent le signe que l’audit RGESN ne répond pas au cadre imposé. Personnellement, j’ai la plus grande méfiance sur un premier audit RGESN qui, aujourd’hui, donnerait un score de 80% ou plus (on voit même passer parfois sur 100%…). C’est ce que nous allons illustrer dans la partie suivante en nous intéressant aux critères qui ne sont jamais satisfaits ou presque.
D’ici là, précisons qu’il apparaît aujourd’hui préférable d’avoir un score d’avancement moyen et un plan d’action solide plutôt qu’un score d’avancement élevé sans savoir exactement quelles seront les prochaines étapes (ou comment le score a été obtenu).
De même, l’absence de justification ou d’éléments de preuve est rédhibitoire.
Les critères qui ne sont jamais satisfaits ou presque
“Avant de réfléchir à un mode éco, concevons des services numériques aussi légers que possible par défaut”
Lors des audits, certains critères ne sont pour ainsi dire jamais validés. On trouve principalement plusieurs raisons à cela :
Voyons ceci plus en détail :
La liste pourrait être plus longue que cela mais il est important de mentionner ici qu’un Consortium dédié au RGESN a été mis en place avec l’accord de l’ARCEP. L’objectif de ce collectif de volontaires est de faciliter l’évolution du référentiel et la mise en place des outils permettant sa bonne utilisation. Ce groupe d’experts et d’expertes a élu domicile sur le Slack et le Mattermost des Designers Ethiques et formé des groupes de travail dédiés à faire évoluer les différents critères mais aussi à mettre à disposition tout ce qui est nécessaire pour la bonne adoption du référentiel.
“Anticiper pour ne pas subir”
Réaliser un premier audit RGESN peut être assez éprouvant, notamment pour toutes les raisons que nous venons d’évoquer. C’est d’ailleurs pour cela qu’il peut être intéressant d’être accompagné par des professionnels ou en tout cas des personnes ou communautés qui ont déjà effectué ce type d’audit.
Mais l’audit permet aussi de mettre en évidence certains risques et opportunités pour la suite. Ainsi, les réponses à certains critères peuvent être mutualisées pour les prochains audits. En particulier pour auditer par la suite des services numériques ayant recours au même hébergeur (ce qui nous ramène à l’idée de mettre ces éléments de réponse en avant directement sur le site de l’hébergeur en question), à la même stack technique ou au même design system.
On peut également imaginer que les réponses à certains critères soient directement intégrées dans des normes de développement, une politique de gestion des données, une charte éditoriale ou autre. Il devient alors possible, notamment au début d’un projet, de remplir un questionnaire rapide permettant de préremplir les réponses à certains critères via des templates. Pour faire écho à ce que j’écrivais plus haut, il ne faut pas non plus copier-coller directement une déclaration ou une partie de celle-ci. Il faut vérifier l’ensemble de ces éléments et garder en tête que le but de la démarche est l’amélioration de la démarche d’écoconception, pas l’obtention du meilleur score possible.
Si le RGESN aide fortement pour l’adoption d’une démarche d’amélioration continue liée à l’écoconception, il faut également envisager une démarche similaire pour l’audit lui-même. En particulier, il faut garder en tête de mettre à jour régulièrement la déclaration et la grille d’audit (par exemple lors de modifications importantes sur le service numérique audité et/ou à intervalle régulier mais aussi en cas d’évolution du référentiel lui-même). Pour cela, il est probable qu’un système de versioning devienne indispensable, de même que l’automatisation de la génération de la déclaration d’écoconception à partir de la grille d’audit. En effet, la solution proposée (génération d’un PDF directement à partir de la grille d’audit) est pratique mais pas vraiment lisible en l’état. C’est pourquoi, souvent, les déclarations d’écoconception reprennent les éléments essentiels et fournissent le lien vers ce tableau en PDF.
Dans la même logique, il est important de rappeler que le RGESN aide à définir une stratégie de mesure : quel parcours ou quelles pages, sur quel(s) type(s) de terminal, les métriques récupérées, avec quel(s) type(s) de connexion à Internet et quand (fréquence et/ou déclencheurs). Cette composante est tout aussi essentielle pour l’amélioration continue.
“L’usage et le plan d’actions améliorent la pratique, pas le score”
Le RGESN s’impose comme un référentiel incontournable pour structurer les démarches d’écoconception de services numériques. Pour autant, il n’est pas exempt de défauts mais les retours des utilisateurs et les travaux du Consortium RGESN devraient aider à y remédier. La multiplication des déclarations en ligne et des retours illustrent déjà le fait que le référentiel aide à diffuser l’écoconception. Ce n’est déjà pas anodin.
Enfin, il est important d’insister sur le fait que le score obtenu à la suite de l’audit est bien un score d’avancement (et non de conformité) et qu’il n’a pas besoin d’être le plus élevé possible. En revanche, il est nécessaire de fournir les preuves et justifications pour la validation des critères et il est préférable d’établir un plan d’actions pour s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue.
C’est également dans cette optique que Greenspector propose une formation à la mise en place du RGESN et son auto-évaluation, principalement basée sur de la mise en pratique à partir d’un cas concret : https://oxiane-institut.com/formations/m4-formation-a-laudit-rgesn/