La semaine du développeur éthique et responsable

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Le logiciel est partout. Oui, désormais le logiciel a un impact direct sur le monde dans lequel nous vivons : uberisation, digitalisation… mais stoppons ici la buzzwordisation… Nous, développeurs sommes les architectes d’un monde virtuel au service du réel. Nos actions ont un effet sur nos sociétés et sur nos vies. Si nous acceptons d’être crédités des effets bénéfiques, alors soyons capables de voir aussi les effets néfastes.

Exclusion sociale, impacts divers sur l’environnement, fracture numérique… sont des effets bien réels des logiciels que nous produisons.

Mais avons-nous le choix face au demandes de nos utilisateurs et des clients, et aux contraintes classiques de coût et de délai ? Pouvons-nous coder différemment ? Eh bien oui, et c’est le choix qui est fait par de nombreuses entreprises ou développeurs individuels : bénévolat comme Code for America, écoconception de logiciel public… Être développeur éthique et green c’est possible, mais comment, très concrètement, faire cela au jour le jour ?

Lundi : (Re)pense à l’impact du logiciel

Le Lundi, c’est généralement le jour des poker planning, des rétrospectives et surtout du moment où l’on va discuter des tâches de la semaine. Un logiciel responsable, c’est avant tout un logiciel qui respecte l’environnement et l’homme. Le début de semaine est le bon moment pour repenser à toutes ces fonctionnalités que tu vas développer. Sont-elles toutes vraiment nécessaires ? Est-ce que ce choix d’’ergonomie ne va pas exclure une partie de la population ? Est-ce que tu vas intégrer des éléments qui vont à l’encontre des intérêts de l’utilisateur (tracking…) ? C’est le moment d’en discuter avec ton client ou avec le Product Owner. Ne t’inquiète pas, l’éthique et la responsabilité sont contagieuses.

Mardi : Passe en mode « slow connection »

Non, tu ne dois pas rester dans une tour d’ivoire avec ta connexion fibre et 4G. De nombreux utilisateurs ne disposent pas d’une couverture 4G (zone rurale, pays en développement…). Ton application ou ton site web est peut-être totalement inutilisable avec une connexion 2G ? Rien de plus simple pour vérifier cela: passe ton téléphone en 2G et navigue sur ton site. Passe la journée comme cela, et tu auras sûrement de l’empathie pour ton utilisateur nomade dans le Larzac.

Mercredi : Passe en low-tech

Tu te réjouissais de retrouver une bonne connexion réseau ? Mais as-tu pensé que tes utilisateurs n’ont pas forcément le dernier appareil à la mode, genre un Galaxy S28 ou un iPhone 15 ? Toi tu développes sur une plateforme de tueur, sur un émulateur de killer, effectivement ça tourne vite. Mais aujourd’hui, passe en mode low-tech : prends un smartphone avec moins de 2 CPU, emprunte le PC du stagiaire pour visiter ton site… Les outils de développement de Chroma sont aussi très utiles. Tu peux émuler une visite avec un seul CPU. Si après cela tu allèges ton appli, alors non seulement tu auras plus d’utilisateurs potentiels, mais en plus tu auras évité de créer chez les autres un impérieux désir de renouveler leur matériel parce que vraiment ça rame trop. Hé oui, l’obsolescence n’est pas que programmée par les fabricants.

Jeudi : Perd tes sens

Tu es peut être un super développeur avec la pleine capacité de tes 5 sens, alors simule la perte d’un ou de plusieurs de ces précieux sens. Utilise un lecteur d’écran, ferme les yeux et écoute ton site. Pas simple ? L’accessibilité est importante, sinon tu exclus toute une partie de la population. A la fin de la journée, tu auras sûrement envie d’appliquer quelques règles d’accessibilité supplémentaires. Pour cela, une référence : Accessiweb.

Vendredi : Ne mets pas en prod, mesure d’abord la consommation d’énergie

Bon d’abord, on ne met jamais en prod un vendredi (en cas de doute, tu peux vérifier ici). Donc autant terminer les vérifications utiles ! Depuis le début de la semaines, tes actions ont sûrement réduit l’impact global de ton application sur l’environnement. Mais pour en être sûr, et surtout pour éviter de futures dérives, il faut ME-SU-RER. Hé oui, même si tu penses que les consos de ressources c’est pas un problème, ça va passer parce que tu as fait super-gaffe… je suis au regret de te dire que l’intuition ne suffit pas dans ce bas-monde. Et tes utilisateurs, eux, surveillent de très près le niveau de leur batterie et leur forfait data. Enfin, si en bon adepte de la perf tu te focalises sur la rapidité d’affichage, tu risques fort de passer à côté d’une réduction d’énergie pourtant tout-à-fait possible… Et même, tu risques d’augmenter les consommations, ce qui n’est vraiment pas une bonne idée. Alors, mesure puis agis.

Samedi : Git pull request la bonne parole

Comme coder c’est ta passion, tu travailles le week-end sur un side project libre open source. Pourquoi ne pas essayer de proposer des améliorations que tu aurais apprises cette semaine à la communauté ? L’open source est un environnement propice pour appliquer toutes ces bonnes pratiques.

Dimanche : Sois fier d’être responsable

D’habitude lors du repas de famille, « toi qui travailles dans l’informatique » on te parle des derniers problèmes d’imprimante de Tonton Robert. Ben oui, ils n’ont jamais rien compris à ton métier. Faut dire que quand tu as essayé d’expliquer les nouveautés géniales d’Angular 2 à Tata Agathe, tu avais un peu plombé l’ambiance.

Mais cette fois, c’est différent. La semaine qui vient de s’écouler a changé quelque-chose. Aujourd’hui, tu peux raconter fièrement ce que tu as fait, parler de tes bonnes actions, de leurs effets bénéfiques très concrets pour la société et l’environnement. Cette fois, je suis sûr que tu verras le visage de tes interlocuteurs commencer à s’éclairer, avec peut-être même au fond de ces regards approbateurs, comme l’apparition d’une marque de respect pour ce métier de développeur que tu assumes désormais si fièrement. La semaine d’après sera définitivement différente.