Catégorie : Numérique responsable

Analyse des surconsommations d’un site sobre 

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En mai 2024, sur le Slack des Designers Ethiques, Julien-Antoine Boyaval de l’agence web Konfiture partage un site réalisé pour Leroy Merlin. Le site en question (qui contient une seule page) est présenté comme écoconçu : https://lesdesignersdedemain.com/    

À première vue (via les outils du navigateur web), le site apparaît en effet plutôt léger. Toutefois, certains éléments attirent mon attention. Nous y reviendrons. 

Comme à mon habitude, je lance un benchmark avec Greenspector Studio afin d’aller plus loin.  

Analyser les surconsommations d’un site 

Les mesures ont été effectuées sur un téléphone Samsung Galaxy S9, en WIFI (3 itérations). 

Après mesure, les résultats confirment les soupçons initiaux :  

  • EcoScore : 61/100 (Réseau : 82, Client : 40) 
  • Données transférées : 292 ko 
  • Décharge totale de la batterie : 5,28 mAh 
  • Process CPU (1,11 %) 

Les données transférées sont effectivement faibles et, en conséquence, le score côté Réseau est très bon.  

Résultats du site d'origine via Greenspector Studio : Ecoscore à 61/100
Résultats du site d’origine via Greenspector Studio

En revanche, le score côté Client est bas, ce qui est corrélé avec une décharge élevée de la batterie et un impact CPU élevé (surtout pour une page statique et aussi légère). Généralement, ceci peut être dû à des services tiers, des animations voire des calculs (principalement JS) effectués en boucle.  

On commence par regarder ce qui se passe lorsque l’utilisateur est inactif, via Greenspector Studio :  

Observation via Greenspector Studio du CPU et des données transférées sur une étape de pause : 3 pics de données transférées, plusieurs de CPU
Observation via Greenspector Studio du CPU et des données transférées sur une étape de pause 

On remarque 3 pics de données qui sont probablement liés directement à Chrome (qui collecte des métriques d’usage et vérifie régulièrement les fonctionnalités proposées par la version du navigateur).  

Cette hypothèse fut par la suite étudiée via l’utilisation d’un proxy web (car les requêtes en question n’apparaissaient pas dans le navigateur). Ceci permit de confirmer que ces requêtes étaient bien liées à Chrome. 

Sur un site plus lourd, ces requêtes peuvent passer inaperçues mais pas ici.  

La méthodologie utilisée s’inspire de celle décrite ici : https://greenspector.com/fr/auditer-requetes-application-mobile-android/  

Mais il faut surtout s’interroger sur les fluctuations fortes du CPU. Il y a bien quelques animations sur le site mais la plupart ne sont déclenchées qu’au scroll. Elles ne devraient donc pas directement impacter le processeur lorsque l’utilisateur est inactif et les animations non-déclenchées. 

Nous nous replions donc vers l’outil Performance des outils de développeur de Chrome : https://developer.chrome.com/docs/devtools/performance?hl=fr  

Observation via l’outil Performance de Chrome d’une étape de pause : plusieurs solicitations dues aux animations.
Observation via l’outil Performance de Chrome d’une étape de pause 

En regardant ce qui se passe pendant 10 secondes d’inactivité, on constate que le processeur est très sollicité avec de très nombreux événements à traiter en continu. Rapidement, il apparaît de nombreux traitements JS (d’écoute ou d’observation) guettant certaines interactions de l’utilisateur pour déclencher les animations.  

Tout ceci est géré par une librairie très utilisée : GSAP.  

Arrivé là et avant d’aller plus loin, j’ai contacté Julien-Antoine directement afin de planifier un moment pour présenter mes constats à son équipe.  

Après quelques échanges, il apparaît intéressant de travailler ensemble sur ce sujet. L’objectif est de voir comment réduire les impacts de la page via de l’analyse et des mesures. Pour cela, nous décidons de procéder de façon itérative : proposer une première liste de préconisations et les appliquer une par une pour pouvoir estimer l’impact de chacun par de la mesure.  

Expérimentations autour du site 

Dans un premier temps, il faut s’assurer que le badge affiché sur le site, provenant de Website Carbon Calculator n’est pas en cause (ce qui serait un comble). Pour cela, un tel badge est intégré sur une page HTML vide pour être mesuré via un benchmark.  

L’EcoScore est de 95, les données transférées très faibles (un simple script JS de moins de 2 Ko qui récupère en une seule fois tout le nécessaire pour l’affichage) et l’impact sur le processeur négligeable (autour de 0,25% de sollicitation CPU).  

Le badge est donc hors de cause.  

En parallèle, l’équipe côté Konfiture déploie le site que nous voulons étudier sur un serveur à part qui accueillera les différentes versions réalisées. Une première mesure est effectuée pour constituer le point de référence pour la suite, certaines métriques pouvant varier en fonction des conditions d’hébergement du site.  

La première version mesurée s’affranchit de la librairie Lenis qui gère en partie les animations.  

La version 1.0.2 correspond à l’optimisation plus poussée des SVG (images vectorielles). Il en résulte une légère réduction des données transférées. 

La version 1.0.3 ajoute le chargement progressif natif pour les SVG ainsi que la mise en place d’un CDN et de la compression (brotli) des fichers texte (dont SVG). Il en résulte une réduction notable des données transférées.  

La version 1.0.5 supprime toutes les animations. Pour le client final, ceci n’est pas envisageable car les animations sont jugées essentielles afin de rendre le site plus attractif. Mais, une fois les autres éléments optimisés, cette mesure nous donne une cible à atteindre. Ici, on constate une réduction des données transférées (moins de JS nécessaire) mais surtout de la sollicitation CPU (qui reste l’une des métriques les plus affectées par les animations du fait des calculs nécessaires). 

Pour aller plus loin sur ce sujet, je vous renvoie vers deux autres articles du présent blog :  

La version 1.0.6 s’affranchit de tout code JS pour gérer les animations. Le souci qui apparaît alors est que les animations se font en continu. Même si, à l’usage, cette approche est moins impactante pour le processeur (ce qui est aisément vérifiable via l’outil Performance de Chrome), elle dégrade l’expérience utilisateur et pose problème pour l’accessibilité (critère 13.8 du Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité : https://accessibilite.numerique.gouv.fr/methode/criteres-et-tests/#13.8). 

Après discussion sur le sujet, ce point apparaît rédhibitoire. Si la gestion des animations seulement en CSS est un bon compromis pour les impacts environnementaux, la dégradation de l’accessibilité doit être évitée. 

Les premiers résultats ne correspondent pas exactement à ce qui est attendu. Il est apparu après analyse que le fait d’avoir des animations en continu venait entraver la détection d’inactivité lors des mesures et prolonger artificiellement la durée de scroll.  

En conséquence, la version 1.0.7 propose déjà une première piste : s’appuyer sur le paramètre prefers-reduced-motion du navigateur pour, a minima, désactiver les animations pour les utilisateurs qui le souhaitent. A défaut de pouvoir désactiver la lecture automatique des animations, il faudrait (pour être conforme) réduire leur durée à moins de 5 secondes (voire 4 si on se conforme au critère 4.1 du RGESN : https://www.arcep.fr/mes-demarches-et-services/entreprises/fiches-pratiques/referentiel-general-ecoconception-services-numeriques.html#c36264 ) et/ou proposer un moyen de contrôle afin de les mettre en pause. Ce point reste en discussion. 

Afin d’aller plus loin, la version 1.08 cherche à concilier écoconception et accessibilité. Pour cela, il a été décidé de limiter la durée des animations et, en conséquence, de ne les déclencher qu’au scroll afin de s’assurer qu’elles soient malgré tout visibles.  

Résultats obtenus 

Les résultats suivants sont obtenus via les mesures au fil de l’eau :  

Résultats des mesures : la page sans animations est la moins impctante, suivie par celle où celles-ci sont déclenchées au scroll.
Résultats des mesures pour les différentes versions

Projection environnementale pour les différentes versions : le classement reste sensiblement le même que pour les mesures, le plus avantageux restant de ne pas utiliser d'animations.
Projection environnementale pour les différentes versions 

Au préalable, il convient ici de rappeler que l’impact sur le CPU, la mémoire mais aussi la décharge de batterie dépendent fortement du modèle d’appareil utilisé pour la mesure mais peuvent aussi varier entre deux appareils du même modèle. C’est pour cela que chaque mesure comprend également une étape de référence non-affichée ici. Pour des pages web, cette étape de référence consiste à mesurer ce qui se passe lorsque l’utilisateur est inactif sur un onglet de Chrome affichant une page entièrement noire (impact énergétique minimal, notamment par rapport à l’onglet vide de Chrome qui est très clair donc plus impactant si on utilise un appareil avec un écran OLED).  

Résultats pour la version finale du site (EcoScore à 70/100)
Résultats pour la version finale du site

Les mesures sur des sites aussi légers sont souvent plus compliquées car les écarts et surconsommations peuvent être légers voire difficiles à distinguer d’artefacts de mesure, par exemple. Parfois, il est possible de contourner cela en adaptant la méthodologie. Par exemple, pour mesurer un composant très léger, on l’intègre 100 ou 1000 fois sur la page et on procède de même avec d’autres composants que l’on voudrait comparer. 

L’augmentation de la durée de scroll suite à l’application en continu des animations a provoqué un allongement conséquent de la durée de scroll (17 secondes au lieu de 6), ce qui augmente directement l’impact énergétique et les impacts environnementaux.  

Pour des sites aussi légers, les requêtes “parasite” de Chrome (télémétrie, vérification des variantes) apparaissent d’autant plus impactantes, même si seulement quelques Ko ou dizaines de Ko de données sont transférés.  

Dans le cas qui nous intéresse ici, la meilleure solution pour pouvoir limiter les impacts de l’intégration des animations correspond à la version 1.0.8. Cette dernière bénéficie de l’implémentation des bonnes pratiques suivantes :  

  • Optimisation poussée des SVG (notamment via la compression et le lazy-loading) 
  • Limiter la durée des animations, les stopper pour les utilisateurs en faisant le choix et ne les déclencher qu’au scroll. 

Au global, sur le nombre de requêtes et les volumes de données transférées, les gains sont indéniables (même si le site était à la base très léger). 

Concernant la vitesse de décharge de batterie, les gains ne sont pas négligeables. Même si les impacts environnementaux et la consommation d’énergie apparaissent au global identiques voire légèrement plus élevée (à cause de l’augmentation de la durée de scroll), les résultats sont encourageants.  

Conclusion 

Comme déjà souligné dans l’article sur les sites sobres, l’estimation de la sobriété d’un site est complexe car elle prend en compte de nombreux facteurs mais aussi une méthodologie particulière. Même sur un site annoncé comme sobre, il reste souvent des améliorations à mettre en place (même si toutes ne valent pas forcément le coup).  

Une fois n’est pas coutume, le sujet des animations revient. Parfois utilisées pour compenser la réduction du nombre d’images, elles sont très souvent impactantes, même si les outils gratuits occultent cet impact (en se concentrant sur les transferts de données effectués lors du chargement de la page). Lorsque, comme ici, on veut aller plus loin pour les intégrer de façon aussi efficiente que possible, les résultats ne sont à ce jour pas forcément concluants. La priorité devrait être la frugalité (s’affranchir des animations) puis la sobriété (en réduire le nombre) et enfin l’efficience (optimiser leur intégration). Toutefois, notamment pour des raisons d’accessibilité, leur utilisation devrait être proscrite (mais aussi en s’appuyant sur le critère 4.1 du RGESN).  

Pour ce qui est de l’intégration efficiente des animations, tout reste à faire. Ce chantier est très complexe à aborder car les métriques à prendre en compte sont nombreuses et complexes à mesurer et comparer (CPU, GPU, décharge de batterie, etc). Ajoutez à cela les risques de transfert d’impact (opter pour du CSS plutôt que du JS ou inversement) et vous aboutissez à un sujet technique pour le moins épineux. Toutefois, on note ici que la limitation de leur durée, couplée à des logiques simples pour leur déclenchement, apporte les meilleurs résultats. 

Aujourd’hui, les référentiels et connaissances permettent d’énoncer comment rendre conforme une animation du point de vue de l’accessibilité. Pour l’écoconception, ce n’est pas encore le cas (même si le RGESN propose des pistes). Il n’y a pas (à ma connaissance) de solution universelle pour proposer des animations qui n’entraînent pas de surconsommation. 

D’un point de vue très pragmatique, il convient donc de revenir à une approche simple mais importante : évitez autant que possible l’intégration d’animations, aussi bien pour des raisons d’accessibilité que d’écoconception (et plus généralement d’expérience utilisateur).  

Greenspector Studio et RGESN 

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L’arrivée de la version finale du RGESN (Référentiel général d’écoconception de service numérique) pose plus que jamais la question de comment valider les différents critères. Il est parfois reproché à ces derniers d’être trop déclaratifs voire pas assez précis.

Nous aborderons ici les apports des outils de Greenspector Studio sur ces sujets. La possibilité d’intégrer ces outils à une PIC (Plateforme d’Intégration Continue) aide alors à aller vers de l’amélioration continue voire vers l’automatisation (forcément partielle) du contrôle de conformité. La validation exhaustive de la plupart des critères ne pourra pas être automatisée, de même que pour l’accessibilité numérique. Toutefois, il est souhaitable d’automatiser tout ce qui peut l’être, ne serait-ce que pour remonter des alertes en cas de dégradation.

Via cette démarche de vérification de la conformité par la mesure, nous verrons se dessiner une véritable stratégie de mesure.

Nous distinguerons par la suite deux types de critères :

  • Ceux qui nécessitent de la mesure pour être validés
  • Ceux pour lesquels la mesure permet d’aller plus loin et notamment au-delà du simple déclaratif

Préambule

Il est important avant toute chose de bien définir ce qu’est le périmètre de l’audit RGESN. Comme le nom l’indique, il est ici question d’un service numérique. Si cette notion n’est pour l’instant pas précisément définie dans le référentiel, il s’agit a priori d’un applicatif (site web, application mobile ou autre) qui sera audité, ainsi que l’ensemble de ses parcours utilisateurs représentatifs et fonctionnalités.  

Cette précision est importante pour la mesure, afin de savoir s’il faut opter pour une mesure simple d’un échantillon d’écrans ou d’usages représentatifs (de type benchmark) ou pour un parcours utilisateur. 

La définition de cet échantillon s’appuie souvent sur la liste des fonctionnalités mises à disposition ainsi que sur des statistiques d’usage.  

Si un même service (faire des achats en ligne, consulter son compte en banque, regarder des vidéos, etc) se décline en plusieurs applicatifs (site web, application Android, application iOS), chaque applicatif devra faire l’objet d’un audit.  

Si un applicatif comporte plusieurs parcours représentatifs, ils devront tous être pris en compte au cours de l’audit.  

Il est possible de regarder ce qui se fait du côté de l’accessibilité pour aller plus loin sur le sujet de cette constitution d’échantillon : https://accessibilite.numerique.gouv.fr/obligations/evaluation-conformite/  

Critères reposant sur de la mesure 

1.4 – Le service numérique réalise-t-il régulièrement des revues pour s’assurer du respect de sa démarche d’écoconception ? 

Il est question ici de prévoir une revue régulière via le RGESN, accompagnée d’audits de performance et de tests de charge.  

Greenspector Studio permet aussi, en particulier via les mesures de parcours, de suivre la performance (en plus de l’énergie, des données transférées et des indicateurs environnementaux). La mesure d’écrans via l’outil de benchmark permet de vérifier automatiquement le respect de bonnes pratiques techniques. La mesure régulière sur les parcours et écrans identifiés peut donc permettre de valider en partie ce critère.  

1.5 – Le service numérique s’est-il fixé des objectifs en matière de réduction ou de limitation de ses propres impacts environnementaux ?  

Il sera ici possible de lister et suivre régulièrement différents indicateurs environnementaux. La méthodologie d’évaluation est disponible publiquement : https://greenspector.com/wp-content/uploads/2024/05/Methodology_Greenspector_full_EN-Version-202405.pdf [PDF, 1,1 Mo, en anglais] 

Sur chaque projet, les objectifs de réduction sont généralement définis dès les premières mesures, notamment via un budget environnemental. Nous y reviendrons dans un prochain article. 

2.9 – Le service numérique a-t-il pris en compte les impacts environnementaux des composants d’interface prêts à l’emploi utilisés ? 

La mesure des différents composants ou intégrations d’un même composant permet de comparer directement les résultats. Le dashboard proposé via Greenspector Studio ainsi que des fonctionnalités de l’atelier de mesure permettent une comparaison directe selon divers paramètres.  

Il est possible pour cela d’imaginer une méthodologie proche de celle qui avait été utilisée précédemment pour comparer le poids des éléments d’une page web : https://greenspector.com/fr/reduire-poids-page-web-quels-elements-plus-impactants/  

2.10 – Le service numérique a-t-il pris en compte les impacts environnementaux des services tiers utilisés lors de leur sélection ? 

La démarche est ici similaire à ce qui a été présenté ci-dessus pour les critères 2.8 et 2.9. En complément (nous y reviendrons plus loin), l’outil benchmark permet la vérification automatique de certaines bonnes pratiques techniques, ce qui peut être un gain de temps pour la validation de certains critères du RGESN (en particulier lorsqu’il est question de compression, de chargement progressif et autres).  

3.1 – Le service numérique repose-t-il sur une architecture, des ressources ou des composants conçus pour réduire leurs propres impacts environnementaux ? 

Via Greenspector Studio, différents composants ou choix d’intégration peuvent être comparés par la mesure, notamment via du A/B Testing ou du feature flipping.  

4.3 – Le service numérique optimise-t-il le parcours de navigation pour chaque fonctionnalité principale ? 

Comme indiqué dans les moyens de test et de contrôle pour ce critère, des indicateurs techniques doivent être définis pour les parcours identifiés. Il est alors souhaitable de définir un budget environnemental ainsi qu’une fréquence de mesure afin de suivre leur évolution dans le temps.  

4.4 – Le service numérique permet-il à l’utilisateur de décider de l’activation d’un service tiers ? 

La mesure est ici nécessaire pour renseigner le possible coût environnemental d’un service tiers. 

Selon le cas, il sera possible d’automatiser l’activation du service-tiers ou de mesurer ses impacts lors de phases d’inactivité de l’utilisateur. En complément, le feature flipping permet d’isoler l’impact de certains composants et services tiers. 

4.5 – Le service numérique utilise-t-il majoritairement des composants fonctionnels natifs du système d’exploitation, du navigateur ou du langage utilisé ? 

Les composant fonctionnels non-natifs et natifs doivent être comparés et suivis via les ressources chargées et l’utilisation effective de celles-ci.  

4.8 – Le service numérique limite-t-il le nombre des polices de caractères téléchargées ?  

Le nombre des polices chargées et surtout leur poids doivent être vérifiés (et dans l’idéal suivis dans le temps), ce qui est possible via de la mesure. 

4.9 – Le service numérique limite-t-il les requêtes serveur lors de la saisie utilisateur ?   

Via un parcours automatisé, il est possible de reproduire la saisie par un utilisateur et, ainsi, de vérifier par la mesure que les requêtes générées respectent bien les seuils imposés par le RGESN (volume de données transférées et délai entre deux requêtes).  

4.10 – Le service numérique informe-t-il l’utilisateur du format de saisie attendu, en évitant les requêtes serveur inutiles pour la soumission d’un formulaire ?    

Via l’automatisation de la saisie d’un formulaire, il est possible de vérifier que les éléments renseignés sont bien contrôlés côté client avant envoi. 

4.12 – Le service numérique indique-t-il à l’utilisateur que l’utilisation d’une fonctionnalité a des impacts environnementaux importants ?  

Pour pouvoir informer l’utilisateur des impacts environnementaux d’une fonctionnalité, il est nécessaire d’évaluer ceux-ci via de la mesure. 

4.15 – Le service numérique fournit-il à l’utilisateur un moyen de contrôle sur ses usages afin de suivre et de réduire les impacts environnementaux associés ? 

L’affichage des impacts environnementaux ainsi que l’évaluation des gains associés à des possibilités de paramétrage nécessitent de la mesure.  

6.1 – Le service numérique s’astreint-il à un poids maximum et une limite de requête par écran ? 

La mesure est essentielle pour définir les seuils (en se basant sur le service existant et/ou sur des services similaires). En complément, il est important ici de suivre ces valeurs dans le temps. 

Critères pour lesquels la mesure est préférable 

2.1 – Le service numérique a-t-il défini la liste des profils de matériels que les utilisateurs vont pouvoir employer pour y accéder ? 

Afin de valider ce critère, il est a minima attendu une liste des profils en question.  

Toutefois, il est important ici de creuser davantage la notion d’utilisabilité en s’appuyant sur des mesures. En particulier, il peut s’agir de mesurer sur un échantillon de terminaux anciens pour quantifier l’impact sur la performance et l’énergie. Ainsi, la définition d’utilisabilité peut être précisée via ce qu’on considère comme une dégradation acceptable par rapport au cas nominal.  

Ceci peut être fait de façon très basique : “sur tel terminal ancien, le parcours utilisateur peut bien être réalisé de bout en bout”.  

Ou de façon plus poussée : “sur tel terminal ancien, le parcours utilisateur est effectué en moins de X minutes et la décharge de la batterie est inférieure à  X mAh”. 

Ces seuils peuvent être déterminés par rapport au cas nominal. Par exemple, on peut s’imposer que le parcours soit au maximum deux fois plus long ou deux fois plus impactant pour la batterie.  

Greenspector Studio permet cela, notamment via la mise à disposition de terminaux aujourd’hui jugés comme anciens :  

  • Le téléphone Samsung S7 date de 2016, le S9 de 2018 
  • Selon les modèles, la tablette Pixel C date de 2016 ou 2017 

Il est possible d’imaginer une démarche similaire pour les ordinateurs.  

2.2 – Le service numérique est-il utilisable sur d’anciens modèles de terminaux ? 

Voir critère 2.1. 

2.3 – Le service numérique est-il utilisable via une connexion bas débit ou hors connexion ? 

Pour les mesures avec Greenspector Studio, il est possible via le banc de mesure d’utiliser une connexion similaire à de la 3G. 

Il est tout à fait envisageable de s’adapter pour réaliser des mesures hors connexion.  

2.5 – Le service numérique s’adapte-t-il à différents types de terminaux d’affichage ? 

Les mesures via Greenspector Studio permettent de vérifier que le parcours utilisateurs s’effectue correctement sur un ensemble de terminaux. En complément, des captures d’écran sont réalisées au début et à la fin de chaque étape de mesure, ce qui permet de contrôler la qualité de l’affichage. 

2.7 – Le service numérique a-t-il prévu une stratégie de maintenance et de décommissionnement ? 

La mesure permet ici, comme demandé dans le RGESN, de documenter les résultats de la stratégie de maintenance et de décommissionnement (en particulier dans le cas des fonctionnalités) via les gains obtenus selon différentes métriques ou indicateurs. 

2.8 – Le service numérique impose-t-il à ses fournisseurs de garantir une démarche de réduction de leurs impacts environnementaux ? 

La mesure permet de valider les engagements des fournisseurs, en leur transmettant les métriques et indicateurs obtenus, un dashboard détaillé voire les résultats de la vérification automatique de bonnes pratiques techniques (via un benchmark de page). 

4.1 – Le service numérique comporte-t-il uniquement des animations, vidéos et sons dont la lecture automatique est désactivée ? 

Sur les écrans et étapes contenant de tels éléments, l’impact sur les données transférées, la décharge de la batterie et le CPU sont directement identifiables via les outils Greenspector Studio.  

Si nécessaire, des mesures en A/B Testing permettent de quantifier directement les gains liés à la désactivation de la lecture automatique. 

4.2 – Le service numérique affiche-t-il uniquement des contenus sans défilement infini ? 

Voir critère 4.1. 

4.13 – Le service numérique limite-t-il le recours aux notifications, tout en laissant la possibilité à l’utilisateur de les désactiver ? 

Les mesures via Greenspector Studio peuvent permettre de détecter et quantifier les surconsommations liées aux notifications. Les captures d’écran effectuées automatiquement en cours de mesure permettent d’identifier les notifications en question. 

5.1 – Le service numérique utilise-t-il un format de fichier adapté au contenu et au contexte de visualisation de chaque image ? 

La mesure, en particulier des données transférées, permet de détecter les images les plus volumineuses ainsi que l’impact du téléchargement d’un fichier. Partant de là, il est possible d’analyser de façon plus poussée ces surconsommations afin d’identifier si elles sont liées à leur format, leur compression ou leur redimensionnement dans le navigateur. 

5.2 – Le service numérique propose-t-il des images dont le niveau de compression est adapté au contenu et au contexte de visualisation ? 

Voir critère 5.1. 

5.3 – Le service numérique utilise-t-il, pour chaque vidéo, une définition adaptée au contenu et au contexte de visualisation ? 

Les éléments présentés plus haut pour le critère 5.1 peuvent tout à fait s’adapter pour d’autres types de contenus (vidéo et audio), en particulier pour ce qui est du format et du niveau de compression. En complément, pour ces médias, la mesure permet d’identifier les préchargements (qui sont là aussi à éviter, comme stipulé dans le critère 6.5 mentionné plus loin). 

5.4 – Le service numérique propose-t-il des vidéos dont le mode de compression est efficace et adapté au contenu et au contexte de visualisation ? 

Voir critère 5.3. 

5.5 – Le service numérique propose-t-il un mode « écoute seule » pour ses vidéos ? 

Via la mesure, il est possible de quantifier les gains résultant de l’utilisation du mode “écoute seule”. 

5.6 – Le service numérique propose-t-il des contenus audios dont le mode de compression est adapté au contenu et au contexte d’écoute ? 

Voir critère 5.3. 

5.7 – Le service numérique utilise-t-il un format de fichier adapté au contenu et au contexte d’utilisation pour chaque document ? 

Voir critère 5.3. 

En complément, la mesure permet de comparer différentes modalités de mise à disposition d’un document en évaluant les impacts environnementaux selon différents cas d’utilisation possible (ouverture sur téléphone, en connexion dégradée, etc). 

6.2 – Le service numérique utilise-t-il des mécanismes de mise en cache pour la totalité des contenus transférés dont il a le contrôle ? 

Il est ici plus simple de vérifier la stratégie de cache par de la mesure (notamment en comparant les résultats obtenus lors du premier chargement avec les chargements ultérieurs voire lors de la poursuite de navigation sur d’autres pages). En complément, l’outil benchmark de Greenspector Studio vérifie automatiquement l’intégration des entêtes liées au cache.  

6.3 – Le service numérique a-t-il mis en place des techniques de compression pour les ressources transférées dont il a le contrôle ? 

Les surconsommations liées à la non-mise en place de la compression sont détectables via la mesure des données transférées (et indirectement de la performance). Via l’outil benchmark de Greenspector Studio, les éléments non-compressés sont automatiquement détectés et listés.  

Vérification automatique des bonnes pratiques liées à la compression dans l’atelier de mesure Greenspector Studio
Vérification automatique des bonnes pratiques liées à la compression dans l’atelier de mesure Greenspector Studio

6.4 – Le service numérique affiche-t-il majoritairement des images dont les dimensions d’origine correspondent aux dimensions du contexte d’affichage ? 

Les surconsommations liées au redimensionnement des images dans le navigateur sont détectables via la mesure des données transférées (et indirectement de la performance). Via l’outil benchmark de Greenspector Studio, les images concernées sont automatiquement détectées et listées. 

Vérification automatique des bonnes pratiques liées au non-redimensionnement des images dans le navigateur dans l’atelier de mesure Greenspector Studio.
Vérification automatique des bonnes pratiques liées au non-redimensionnement des images dans le navigateur dans l’atelier de mesure Greenspector Studio.

6.5 – Le service numérique évite-t-il de déclencher le chargement de ressources et de contenus inutilisés pour chaque fonctionnalité ? 

Les surconsommations liées au chargement de ressources inutilisées sont détectables via la mesure des données transférées (et indirectement de la performance). En complément, via l’outil benchmark de Greenspector Studio, les images qui ne bénéficient pas du lazy-loading (chargement progressif) sont automatiquement détectées et listées. 

6.7 – Le service numérique héberge-t-il toutes les ressources statiques transférées dont il est l’émetteur sur un même domaine ? 

L’outil benchmark de Greenspector Studio liste automatiquement la liste d’éléments statiques chargés depuis un domaine nécessitant l’envoi de cookies, ce qui facilite l’identification des domaines. 

Construire sa stratégie de mesure 

Dans l’optique d’un audit de conformité au RGESN (et pour son suivi dans temps), il apparaît donc essentiel de mettre en place des mesures. Ceci implique forcément de définir une stratégie de mesure composée des éléments suivants :  

  • Les éléments mesurés : pages ou parcours représentatifs 
    • Pour couvrir l’ensemble des fonctionnalités principales 
    • En se basant sur les statistiques d’usage 
    • Avec un échantillon suffisamment large pour être pertinent 
  • Les indicateurs collectés, en s’assurant d’avoir aussi bien des métriques techniques (mesurées directement) et des indicateurs environnementaux (donc calculés). Tout en mentionnant bien la méthodologie de projection environnementale. 
  • Associés à tout ou partie de ces indicateurs, un budget environnemental avec deux approches complémentaires : 
    •  L’ambition : les valeurs que l’on veut atteindre 
    • Le palier : les valeurs qui permettent d’identifier des régressions via une dégradation trop importante 
  • Les appareils sur lesquels on souhaite mesurer :  
    • Des appareils représentatifs de ceux majoritairement utilisés par les usagers du service audité. Tout en s’assurant si possible de vérifier ainsi l’adaptation du service numérique au terminal d’affichage 
    • Des appareils plus anciens pour les critères liés à l’inclusion 
  • Les types de connexion à internet (avec un cas nominal mais aussi un cas dégradé pour le critère 2.3) 
  • La fréquence de mesure
    • Relativement élevée pour les conditions nominales, afin de suivre l’évolution dans le temps, quantifier les améliorations et détecter les dégradations 
    • Éventuellement plus espacés pour les tests sur terminaux anciens et/ou en connexion dégradée

Conclusion 

Comme souvent dans une démarche de vérification de la conformité, il est impossible de vérifier automatiquement tous les critères. Toutefois, sur les 78 critères actuellement présentés dans le RGESN : 

  • 14 nécessitent des mesures 
  • 21 devraient s’appuyer sur des mesures, notamment pour appuyer la déclaration sur des indicateurs chiffrés et vérifiables 

Au total, ce sont donc presque la moitié des critères qui peuvent (ou doivent) s’appuyer sur des mesures.  

Au-delà de la vérification ponctuelle de conformité, ces mesures devraient être automatisées dans une logique d’amélioration continue.  

Tout ceci est évidemment possible avec Greenspector Studio. 

L’arrivée du RGESN et la volonté de l’appliquer aussi largement que possible renforcent notre conviction de concilier bonnes pratiques et mesures afin de réduire les impacts (notamment environnementaux) des services numériques.  

RGESN / loi REEN : de quoi parle-t-on ? 

Reading Time: 12 minutes

Le sujet des impacts environnementaux du numérique ne cesse de prendre de l’ampleur depuis quelques années. En particulier en France, où il bénéficie de la mise en place rapide d’un contexte légal structurant. Celui-ci avait été abordé dans un autre article du blog de Greenspector : https://greenspector.com/fr/le-cadre-legislatif-de-lecoconception-de-services-numeriques/  


En tant qu’entreprise cherchant à réduire les impacts environnementaux et sociétaux du numérique, Greenspector a forcément à cœur d’explorer en détail ce sujet. Nous vous proposons donc ici de reprendre brièvement la loi REEN (Réduction de l’empreinte environnementale du numérique) pour ensuite nous intéresser au RGESN (Référentiel général d’écoconception de services numériques). 

Cadre de la loi REEN 

La loi REEN impose aux villes et intercommunalités de plus de 50 000 habitants de définir leur stratégie liée au Numérique Responsable d’ici 2025. Celle-ci inclut nécessairement des éléments liés à l’écoconception de services numériques. Toutefois, les collectivités se retrouvent souvent confrontées à un premier obstacle : le sujet de l’écoconception de services numériques est encore relativement récent. Ainsi, il peut être difficile de s’y retrouver, qu’il s’agisse de choisir un outil de mesure ou un guide ou référentiel permettant d’avancer efficacement sur le sujet.  

C’est pourquoi un autre volet de la loi REEN est attendu de pied ferme par beaucoup : la définition des obligations légales d’écoconception de services numériques. Celle-ci devrait se faire sous la forme de 2 items :  

  • Le RGESN que nous allons voir plus en détail dans cet article 
  • Un décret d’application qui définit qui est soumis à ces obligations et avec quelles contraintes (quels types de services numériques, quels délais pour la mise en œuvre, quels livrables attendus, etc.).  

Le référentiel pour tous les lier : le RGESN 

Ses origines 

En 2020, l’INR (Institution du Numérique Responsable) réunit une centaine (!) d’experts pour travailler sur un référentiel pour l’écoconception des services numériques. L’objectif : offrir des recommandations qui couvrent tous types de services numériques, sur toutes les étapes du cycle de vie et pour toutes les personnes impliquées. Bref, une approche holistique. Le chantier est colossal mais approche de l’arrivée à l’été 2021. Il donnera naissance au GR491, qui compte aujourd’hui 61 recommandations et 516 critères. Il devrait prochainement être une fois de plus mis à jour. Il constitue à ce jour une référence unique au monde sur laquelle s’appuyer.  

Juste avant la mise en ligne de ce référentiel, la DINUM (Direction interministérielle du numérique) intervient. Son objectif est simple et tout à fait pertinent : s’appuyer sur les travaux réalisés pour pouvoir construire son propre référentiel. C’est ainsi que, à l’automne 2021, deux référentiels voient le jour : le GR491 et le RGESN.  

Le RGESN a déjà été décliné en deux versions : la première proposée par la DINUM puis une nouvelle version proposée en consultation publique par l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse) fin 2023.  

La version finale a été mise à disposition le 17 mai 2024.  

Son rôle 

Les versions existantes du RGESN référentiel soulignent déjà ses spécificités. Dans le cas de l’accessibilité, le RGAA (Référentiel général d’amélioration de l’accessibilité) permet de contrôler l’accessibilité d’un service numérique en s’appuyant sur des critères issus des WCAG (Web Content Accessibility Guidelines) émises par le W3C (World Wide Web Consortium). Le cadre légal français impose de plus d’afficher la conformité notamment via une déclaration d’accessibilité mais aussi de publier un schéma pluriannuel de mise en accessibilité numérique de l’entité. Tous ces éléments sont consultables ici : https://accessibilite.numerique.gouv.fr/  

Dans le cas du RGESN, la notion de déclaration d’écoconception est incluse directement dans le référentiel et son contenu détaillé au fil des critères. En revanche, ce référentiel ne s’appuie pas sur un référentiel international. En effet, les WSG (Web Sustainability Guidelines : Web Sustainability Guidelines (WSG) 1.0 [EN]) ont été publiées par le W3C après le RGESN. En conséquence, les WSG s’appuient en partie sur le RGESN et non l’inverse.  

Dans le cas du RGESN, l’ambition n’est pas tant de “vérifier” qu’un service numérique est écoconçu que de vérifier qu’une démarche d’écoconception a bien été mise en place. Il devient ainsi possible d’embarquer toutes les parties prenantes sur le sujet (y compris l’hébergeur, les fournisseurs de services tiers mais aussi questionner la stratégie voire le modèle économique) et de s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue. Cette approche est ambitieuse mais aussi liée au fait qu’il est compliqué voire impossible d’établir factuellement (via des critères purement techniques) si un service numérique est écoconçu ou non. Il s’agit plutôt de s’assurer qu’il s’inscrit bien dans une démarche d’écoconception.  

Son contenu 

La V1 (celle de la DINUM) 

Dans sa première version, le RGESN propose 79 recommandations réparties en 8 familles :  

Chaque recommandation se présente sous la forme suivante :  

  • Objectif 
  • Mise en œuvre 
  • Moyen de test ou de contrôle 

Ainsi, par exemple, la première recommandation du référentiel a pour nom “1.1 Le service numérique a-t-il été évalué favorablement en termes d’utilité en tenant compte de ses impacts environnementaux ?” 

  • Son “Objectif” est de s’assurer que le service numérique que l’on cherche à écoconcevoir contribue bien aux Objectifs de Développement Durable (ODD). 
  • Pour cela, la section “Mise en œuvre” propose quelques pistes pour vérifier cela ainsi que les éléments à préciser dans la déclaration d’écoconception.  
  • Le “Moyen de test ou de contrôle” résume ce sur quoi s’interroger pour s’assurer que ce critère est satisfait.  

On arrive ici sur l’une des limites de cette version du référentiel : l’objectif est louable mais il manque de moyens concrets de vérification et de mise en œuvre.  

D’autres points sont soulevés par des experts du sujet mais l’outil reste important et nombreux sont ceux qui s’en emparent pour le tester sur le terrain.  

Le référentiel définit certains éléments pour structurer la démarche d’écoconception notamment via :  

  • La désignation d’un référent 
  • La rédaction d’une déclaration d’écoconception (avec tous les détails relatifs à son contenu) 
  • La mise en place d’une stratégie de mesure. En particulier, la définition d’un budget environnemental en visant entre autres une compatibilité plus large du service en termes de navigateurs, systèmes d’exploitation, types de terminaux et connectivité. 

Les outils qui accompagnent le référentiel (une extension de navigateur, des templates de tableur Excel comme grille d’audit) sont les bienvenus mais parfois insuffisants sur le terrain. Notamment pour pouvoir mener plusieurs audits sur des services numériques différents ou pour pouvoir construire un plan d’action complet.  

Afin de tenir compte de tout cela, intervient la version du RGESN proposée par l’ARCEP.[PDF, 1,6 Mo] 

La V2 (celle de l’ARCEP d’octobre 2023) 

Cette version a été soumise en consultation publique deux ans après la première version.  

Elle apporte quelques modifications significatives :  

  • On passe de 79 à 91 critères, notamment via l’ajout d’une section “Apprentissage” (relative au machine learning) qui introduit 5 nouveaux critères. 
  • En plus d’”Objectif”, “Mise en œuvre” et “Moyen de test ou de contrôle”, 3 nouveaux attributs apparaissent :  
  • Niveau de difficulté 
  • Niveau de priorité 
  • Critères de non-applicabilité 

Du fait de l’ajout du niveau de priorité, les recommandations sont au préalable regroupées par priorité. 20 d’entre elles sont identifiées comme prioritaires, en particulier toutes celles liées à la nouvelle section Apprentissage. 

Au-delà de ces apports, la nouvelle version se démarque de la précédente en étant davantage opérationnelle : elle vise à fournir des éléments concrets pour faciliter la mise en place des recommandations.  

On retrouve par exemple le même critère 1.1 mais présenté de façon plus complète :  

  • Action identifiée comme prioritaire et facile à mettre en place, pas de cas de non-applicabilité 
  • Objectif plus ou moins identique 
  • Davantage d’informations de contexte pour aller plus loin dans la démarche de vérification des apports du service numérique en termes d’impacts environnementaux (et sociétaux) 
  • Des outils concrets de contrôle : le questionnaire des Designers Éthiques et l’arbre de conséquences tel que formalisé par l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie). On retrouve d’ailleurs cet arbre de conséquences par la suite, dans le critère 2.1, dans le cadre des revues de conception.  

Le critère relatif à la déclaration d’écoconception disparaît. Cette dernière n’en reste pas moins essentielle et son contenu défini au fil de différentes recommandations.  

Un autre élément qui se dessine au fil de cette nouvelle version du référentiel est la mise en place d’une stratégie de mesure via la définition d’indicateurs environnementaux (a minima énergie primaire, émissions de gaz à effet de serre, consommation d’eau bleue et épuisement des ressources abiotiques) ainsi que d’une stratégie pour leur réduction et d’un budget environnemental via des seuils. Cette stratégie de mesure devrait également inclure des éléments relatifs à la vérification du bon fonctionnement du service numérique sur des terminaux et systèmes d’exploitation anciens (voire navigateurs anciens) ainsi qu’en connexion dégradée. Via les modifications apportées à la recommandation 4.4, cette stratégie de mesure doit s’étendre à des parcours utilisateurs.  

C’est notamment sur ce sujet de la stratégie de mesure que Greenspector peut intervenir, aussi bien pour la construction de la stratégie que pour sa mise en place. Via la mesure proprement dite mais aussi la définition des indicateurs environnementaux, leur calcul de même que pour la définition des parcours et des terminaux et conditions de connexion. Ainsi, la démarche peut aujourd’hui s’appliquer aussi bien sur les sites web que les applications mobiles et les objets connectés.  

Certains nouveaux critères font le lien avec le RGPD (Réglement général sur la protection des données), le RGS (Référentiel général de sécurité), l’IoT (Internet of Things donc les objets connectés) et l’open source. Aussi, la recommandation 2.6 impose de prendre en compte les impacts environnementaux de briques logicielles telles que l’IA et la blockchain. Ceci dit, cette recommandation aurait tout à fait pu trouver sa place directement dans la section Stratégie. 

La section Contenus apporte de nombreux éléments sur les formats et modalités de compression des contenus, ce qui permet d’aller encore plus loin sur les aspects techniques d’une démarche de sobriété éditoriale. 

De nouveaux critères apportent également des éléments sur la blockchain mais aussi sur le lancement asynchrone de traitements complexes. 

Tout ceci va clairement dans le bon sens. Nul doute que la consultation publique aura permis de récupérer énormément d’éléments pour tendre vers un excellent référentiel mais aussi les outils qui doivent l’accompagner (en améliorant l’extension de navigateur mais surtout le template Excel pour mener les audits de conformité et les suivre dans le temps via un plan d’action).  

Il ressort d’ores et déjà de ces ajouts et précisions que la réalisation d’un audit RGESN prendra davantage de temps qu’avec la V1, ce qui est important pour prendre en compte les critères dans leur ensemble et ainsi lever le plus possible les éventuelles ambiguïtés. Si les intentions du RGESN V1 étaient déjà bonnes, le référentiel se dote dès sa V2 des éléments nécessaires pour faciliter son adoption et sa mise en œuvre. Cette version témoigne également d’une grande maturité sur le sujet et en fait une ressource donc la lecture permet déjà de faciliter la montée en compétences.  

La version finale (celle publiée le 17 mai 2024 par l’ARCEP)

Cette nouvelle version est disponible ici : Environnement | Arcep

On note déjà quelques modifications cruciales par rapport aux versions précédentes :

  • La disponibilité d’une version en ligne (même s’il manque des permaliens pour chaque bonne pratique) : RGESN – en ligne
  • La disponibilité d’une version en anglais [PDF, 2.8 Mo, en anglais]. A noter que cette version a aussitôt ou presque été référencée dans les Web Sustainability Guidelines du W3C (World Wide Web Consortium).
  • Comme annoncé, les réponses à la consultation publique sont également téléchargeables.

A première vue, cette version finale est plutôt proche de cette qui avait été proposée en consultation publique par l’ARCEP. C’est déjà une très bonne nouvelle pour ceux qui avaient déjà commencé à s’emparer du sujet.

La déclaration d’écoconception doit désormais mentionner des éléments sur presque l’ensemble des critères du référentiel. La nouvelle grille d’audit permet le calcul du score d’avancement. Elle est très dense mais aussi très complète. Il est regrettable de ne pouvoir générer la déclaration d’écoconception qu’au format PDF (le format HTML ou un autre format facilement éditable auraient été préférables). L’idéal pourrait être à terme de proposer un outil similaire à celui proposé pour les audits d’accessibilité : https://ara.numerique.gouv.fr/

On retrouve les 9 familles de critères de la version précédente (la famille « Apprentissage » devient « Algorithmie »). On compte au total 78 critères.

En cause ici, la fusion de certains critères. Le risque est alors de complexifier leur validation. C’est notamment le cas du critère 8.1 qui demande que l’hébergeur partage ses indicateurs environnementaux, ses engagements environnementaux et ratifie le Code de Conduite Européen [lien en anglais]. C’est aussi le cas du 6.5 qui incite à charger progressivement les contenus mais aussi le code, ce qui correspond souvent à deux chantiers techniques différents. Le problème est d’avoir en conséquence des critères plus difficiles à valider mais surtout avec un niveau de granularité inapproprié où l’état d’un critère (typiquement « non-validé ») ne permet pas d’estimer (voire de récompenser) finement les efforts réalisés. Pour ceux qui souhaiteraient creuser davantage ce sujet, je vous invite à explorer la façon dont Opquast définit ses règles.

De nouveaux critères font leur apparition :

  • 5.5 – Le service numérique propose-t-il un mode « écoute seule » pour ses vidéos ?
  • 4.14 – Le service numérique évite-t-il le recours à des procédés manipulatoires dans son interface utilisateur ?
  • 9.5 – Le service numérique optimise-t-il l’occurrence de mise à jour et de réentraînement des modèles en fonction de ses besoins et des cibles utilisatrices ?
  • 9.7 – Le service numérique utilise-t-il une stratégie d’inférence optimisée en termes de consommation de ressources et des cibles utilisatrices ?

L’ancien critère 5.5 (format des fichiers audio) disparaît.

En conséquence, certains critères changent de numéro (le 1.8 sur le référent écoconception devient 1.3) en plus de (nombreux) nouveaux détails ajoutés dans le contenu de certains critères. Ainsi, la validation des critères est davantage guidée. A terme, la publication des déclarations d’écoconception ainsi que les éventuelles listes de diffusion dédiées au sujet (au même titre que ce qui est proposé pour le RGAA) devraient permettre de lever les ambigüités restantes.

De même, certains critères sont déplacés. En particulier, les critères liés aux matériels ciblés (dont système d’exploitation et version de navigateur ainsi que design adaptatif) et au type de connexion utilisable sont regroupés dans la famille Spécifications.

Chaque critère se voit doter des mêmes attributs que sur la précédente version (priorité, difficulté, non-applicabilité, Objectifs, Mise en oeuvre et Moyen de test ou de contrôle), auxquels viennent s’ajouter les métiers concernés. On note au passage une nouvelle répartition des priorités avec 30 critères sur 78 identifiés comme prioritaires.

On note également que le calcul du score d’avancement a été légèrement modifié. En particulier, les critères non-applicables ne contribuent plus directement au score. Sur la version précédente, les critères non-applicables étaient ajoutés au même titre que les critères validés. Ils sont désormais directement retirés du total cible.

Plus généralement, l’appui sur la mesure est de plus en marqué, notamment pour de l’A/B testing (comparer par la mesure les impacts de composants, fonctionnalités ou choix d’implémentation).

Au final, si le nombre total de critères diminue, la complexité de validation de certains d’entre eux augmente et certains regroupement de critères apparaissent discutables.

Il n’en reste pas moins que cette nouvelle version apporte son lot de précisions qui sont les bienvenues.

Qu’attendre de la suite ? 

Le RGESN est appelé à évoluer au fil du temps et peut-être même à trouver une déclinaison au niveau de l’Europe. Il s’agira sans nul doute d’un outil essentiel pour structurer les démarches d’écoconception de services numériques. Ainsi, les pratiques de chacun pourront évoluer sur ce sujet.  

Les outils qui l’accompagnent ont bien progressé dans la version finale mais pourraient aller encore plus loin.

Le référentiel impose entre autres la publication d’une déclaration d’écoconception complète, ce qui permet de sensibiliser plus largement mais aussi de confronter les pratiques. Donc de faire évoluer ce domaine d’expertise.  

La grande inconnue reste le décret d’application à venir, qui doit poser le cadre d’application de la loi REEN en s’appuyant sur le RGESN. Il reste à ce propos plusieurs inconnues. Si l’on se base sur ce qui est fait pour l’accessibilité (et en particulier à la suite du décret d’octobre 2023), des questions restent en effet en suspens :  

  • L’utilisation du RGESN sera-t-elle limitée au web ou étendue à d’autres types de services numériques (applications mobiles, mobilier urbain, etc) ? A minima, il serait important d’embarquer les applications mobiles en complément des sites et applications web. 
  • Quelles seront les sanctions ? 
  • Quels seront les délais pour la mise en place ? 
  • Quelles structures seront concernées ? Les structures publiques seront a priori les premières concernées mais, comme pour l’accessibilité, il serait intéressant de viser aussi les entreprises. Certaines, d’ailleurs, ont déjà commencé à s’emparer du sujet car elles ont reconnu l’intérêt de ce référentiel pour guider leurs démarches d’écoconception de services numériques. 
  • Quels seront les moyens mis en place officiellement pour faciliter la prise en main du RGESN (formation, guides, outils, etc.) ? 

D’autres questions plus générales se posent. Notamment, comment certaines entreprises et certains professionnels feront évoluer leurs pratiques et leurs offres, peut-être pour une partie d’entre eux en évoluant vers des rôles d’auditeurs (voire en formant les futurs auditeurs). Il reste également à espérer que la définition plus complète de l’écoconception de services numériques permettra l’émergence de formations certifiantes (donc de référentiels de compétences validés par France Compétences). 

Un point d’inquiétude subsiste sur la nature déclarative des recommandations. L’avantage du RGAA est de proposer une approche technique voire factuelle (même si certains critères restent parfois sujets à interprétation). Dans le cas du RGESN, les critères sont moins factuels et moins faciles à vérifier, ce qui peut parfois les faire reposer sur l’objectivité de l’auditeur. Reste aussi ouverte la question de la définition de méthodes pour valider certains critères par des mesures. Il reste à voir, à terme, comment le suivi dans le temps du référentiel sera assuré (liste de diffusion par exemple). D’ailleurs, la création d’un « Forum des parties prenantes de l’écoconception numérique » piloté par l’ADEME et l’ARCEP a été annoncée. Il reste à espérer que ce moyen de partage du savoir sera disponible en ligne et plus seulement limité au présentiel sur Paris.

Il sera également intéressant de voir comment tous ces éléments trouveront un écho au-delà de la France et comment le RGESN pourra s’articuler avec l’éventuelle mise en place de nouvelles normes et autres référentiels. 

Et Greenspector dans tout ça ? 

Le RGESN s’impose comme un socle inédit mais surtout indispensable pour améliorer nos propres pratiques et accompagner au mieux nos clients. D’autant plus dans la mesure où ils seront bientôt confrontés à l’obligation d’utiliser ce référentiel.  

Pour cela, plusieurs actions ont été menées à bien :  

  • Intégrer la V1 du RGESN dans notre propre référentiel interne de bonnes pratiques. La version finale du référentiel est prise en compte dès maintenant dans nos accompagnements et sera très bientôt intégrée à notre référentiel de bonnes pratiques. 
  • Incorporer le RGESN dans les formations que nous proposons : présenter le référentiel et son contexte et proposer des activités autour de celui-ci, notamment via la mise en œuvre rapide et encadrée d’un audit RGESN. Les autres référentiels sont également présentés afin de les comparer ainsi que leurs cas d’usage. 
  • Nous effectuons régulièrement des audits RGESN pour des clients et centralisons les informations qui nous permettent de tracer les taux de conformité mais aussi leur évolution dans le temps. De plus, ces audits nous permettent de faire évoluer notre utilisation du RGESN. 
  • Nous nous appuyons systématiquement sur le RGESN lors des audits et revues de design. En complément, notre offre Ecobuild évolue. L’objectif de cette offre est à l’origine d’accompagner une équipe projet dès le début via de la formation, des revues de design, des audits, du monitoring et plus largement de l’expertise. Nous proposons désormais d’appuyer cette offre sur le RGESN, ce qui permet d’aller plus loin encore pour mettre en place ou consolider la démarche d’écoconception de nos clients.  
  • Au-delà de l’approche permettant d’utiliser le RGESN pour auditer/améliorer un site, nous l’utilisons également dans le cadre d’un accompagnement sur une solution de création de sites afin d’avoir des leviers plus globaux mais aussi d’amorcer une réflexion autour des critères RGESN qui peuvent être pris en compte directement à ce niveau. Ce type de raisonnement pourrait par la suite s’étendre à d’autres outils comme WordPress, Drupal et autres CMS. L’intérêt ici est multiple :  
    • Sensibiliser les clients et utilisateurs sur le sujet du RGESN 
    • Rassurer les clients en prenant en charge une partie des critères, ce qui pourrait à terme avoir un caractère différenciant (on peut imaginer à terme des clients qui opteraient vers des solutions “conformes au RGESN” afin de répondre plus facilement aux obligations légales sur le sujet) 
    • Mettre en place les moyens pour que des sites moins impactants soient créés par les utilisateurs/clients  

Conclusion 

Le RGESN s’impose déjà comme un incontournable pour l’écoconception de services numériques mais aussi pour structurer les démarches d’écoconception. En tant que tel, il devrait aider chacun à monter en compétences sur le sujet. Il reste à voir en quoi le cadre légal facilitera cette évolution et induira à terme des changements que l’on espère en profondeur dans les structures concernées. 

Quel est l’impact environnemental des paramètres graphiques des jeux vidéos ?

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D’après une étude de Statista, le secteur du jeu vidéo a généré plus de 155 milliards de dollars américains de revenus dans le monde en 2021. Ce chiffre s’explique par l’augmentation du nombre de plateformes de jeux et de la diversification des types de jeux disponibles pour les consommateurs mais aussi en se démocratisant grâce à l’émergence de jeux gratuits. En 2022, les jeux vidéo ont attiré près de 1,8 milliard de joueurs à travers le globe, transformant ainsi l’expérience de divertissement en une dimension sociale et favorisant l’émergence de nouveaux secteurs comme le streaming et l’esport. 

Or, tous ces jeux, biens que virtuels, sont exécutés sur du matériel physique, et induit donc une consommation énergétique. Cet article présente et compare les consommations énergétiques de différents jeux vidéo et de leurs paramètres. Pour connaitre la consommation réelle de ces usages, nous avons choisi d’évaluer les jeux vidéo suivants : Assassin’s Creed Valhalla, Total War Warhammer III, Borderlands 3, Anno 1800 et War Thunder. 

Nous avons précédemment réalisé une étude sur les jeux mobiles. 

Choix et méthodologie 

Ces jeux vidéo ont été sélectionnés de par le fait qu’ils proposent un benchmark. Utiliser ces benchmarks comme sujet de mesure assure la réplicabilité de notre protocole expérimental, tout en s’affranchissant du facteur humain dans les résultats. 

Un benchmark est une fonctionnalité proposée par le jeu permettant de mesurer les performances d’un système (PC entier), ou d’un de ses composants (CPU, GPU, mémoire …) selon un scénario donné en fonction du paramétrage sélectionné. 

 Nous avons également veillé à représenter plusieurs types de mode de jeu tels que RPG (jeu de rôle), stratégie ou simulation. 

Nous avons mesuré ces jeux vidéo sur un PC disposant de la configuration suivante : 

  • Processeur: i7 6700 
  • Mémoire: 32 Go RAM DDR4 
  • Carte graphique: RTX 3060 12Go 

Ce matériel nous a été fourni par l’entreprise OPP! qui propose de la réparation et maintenance sur PC et Mac ainsi que de la vente individuelle de composants. 

L’écran utilisé est un écran LG E2441 disposant des caractéristiques suivantes: 

  • Technologie d’écran : LED 
  • Taille de l’écran : 24” 
  • Résolution : 1920×1080 

Nous avons collecté les métriques d’énergie grâce à un module de mesure connecté à notre logiciel Greenspector Studio, branché directement sur l’alimentation du PC et de l’écran et relié à la prise secteur. 

Les benchmarks ont été réalisés dans 2 configurations graphiques différentes : 

  • Une configuration avec un paramétrage maximal des graphismes proposés par le jeu  
  • Une configuration avec un paramétrage minimal des graphismes proposés par le jeu 

6 itérations ont été effectuées sur chacun des scénarios pour assurer une fiabilité de résultats. 

Les benchmarks durent entre 80 et 240 secondes. Ces variations n’affectent pas les résultats présentés. 

L’évolution graphique impacte la puissance 

Les jeux modernes intègrent des graphismes de plus haute qualité avec des textures ultra-détaillées, des effets visuels avancés tels que l’éclairage dynamique, les ombres en temps réel et les effets de particules sophistiqués. Cette complexité graphique nécessite des capacités de rendu et de traitement graphique considérables. 

Les joueurs optent également de plus en plus pour des résolutions d’affichage élevées pour une expérience visuelle optimale. Cela place une pression supplémentaire sur le GPU (Graphics Processing Unit, la carte graphique) pour rendre des images détaillées à des résolutions ultra-hautes.  

Ces GPU on des consommations énergétiques croissantes à chaque nouvelle génération comme celles de NVDIA classées ci-dessous : 

Evolution de la puissance minimale du système et la puissance max du GPU selon la date de sortie des GPU 

Les développeurs exploitent des techniques de rendu avancées telles que le ray tracing pour simuler de manière réaliste le comportement de la lumière dans les environnements virtuels. Bien que ces techniques offrent un niveau de réalisme sans précédent, elles nécessitent des calculs intensifs qui exigent des GPU haut de gamme. 

Différences de consommation selon le paramétrage 

Les mesures de puissance moyenne du PC sur la configuration graphique la plus faible et la plus élevée de chaque jeu montrent une grande disparité entre celles-ci. 

Puissance totale du PC en selon le paramétrage minimal ou maximal 

Le fait de passer d’une configuration de paramètres maximale aux paramètres les plus faibles proposés par chacun des jeux résulte d’une diminution de puissance mesurée de 45% en moyenne. Pour le jeu Borderlands 3, on constate même un gain de puissance de 72%. 

Sur le jeu Anno 1800, le benchmark est une vue aérienne panoramique de la carte du jeu. Cette séquence met en valeur les détails du monde du jeu, tels que les paysages, les bâtiments emblématiques et les animations de la vie quotidienne.  

Ci-dessous les graphes d’une itération mesurée avec un paramétrage maximal et d’une autre itération avec paramétrage minimal. Le benchmark balaie la ville de son point de vue aérien zoomé au début puis la même trajectoire se répète 8 fois avec des points de vue de plus en plus hauts ce qui explique les 8 pics sur le graphe. 

Ici, nous constatons facilement la différence notoire entre les 2 niveaux de paramétrage. Sur les deux paramétrages différents on voit d’abord que plus la caméra s’éloigne de la ville, plus la puissance se réduit étant donné le temps de plus en plus court du scénario.  

De plus, lorsque le jeu est paramétré de manière maximale, la consommation est à son pic pendant presque toute la durée du scénario tandis que les mesures faites avec le plus faible paramétrage affichent des pics de puissance moins élevés et plus courts. 

Consommation d’énergie du benchmark Anno 1800 avec paramétrage maximal 

Consommation d’énergie du benchmark Anno 1800 avec paramétrage minimal 

Une enquête Statista réalisée en décembre 2023 a révélé que 22 % des adultes américains âgés de 18 à 29 ans passaient de six à dix heures par semaine à jouer à des jeux vidéo. Dans l’ensemble, les personnes interrogées de ce groupe d’âge étaient également plus susceptibles que les autres d’être des joueurs assidus car un total de 8% jouait à des jeux vidéo plus de 20 heures en moyenne par semaine.  

Ces chiffres nous permettent d’évaluer la consommation d’énergie globale selon les temps d’usage de différents types de joueurs dans le cas où le benchmark est représentatif de la consommation du jeu. La consommation d’énergie a été projetée avec les mesures faites sur les paramétrages minimum et maximums de chaque jeu. 

La moyenne de consommation pour une heure de jeu en paramétrage minimal est de 0,168 kWh et 0,254 kWh en paramétrage maximal. Ces résultats sont plus élevés que ceux de l’étude européenne de l’évaluation de l’impact environnemental des services numériques. Celle-ci affiche une consommation de 0,137 kWh pour une heure de jeu sur PC avec une résolution moyenne. 

 Consommation d’énergie sur 6h de jeu (Wh) Consommation d’énergie sur 10h de jeu (Wh) Consommation d’énergie sur 20h de jeu (Wh) 
Paramétrage Min Max Min Max Min Max 
War Thunder 1469,70 1460,78 2449,50 2434,64 4899,00 4869,28 
Anno 1800 843,26 1352,27 1405,43 2253,78 2810,86 4507,56 
Borderlands 522,33 1537,53 870,55 2562,55 1741,09 5125,09 
Assassin’s Creed Valhalla 1110,49 1618,73 1850,82 2697,88 3701,65 5395,76 
Total War Warhammer III 1108,08 1651,01 1846,80 2751,68 3693,60 5503,37 

La majorité des joueurs ont donc une consommation hebdomadaire comprise entre 1,5 kWh et 2,5 kWh en jouant entre 6 et 10h par semaine. Pour les joueurs davantage impliqués jouant 20h par semaine environ (2h40 par jour), leur PC et écran ont une consommation hebdomadaire de 5 kWh. A même titre de grandeur, un réfrigérateur classique consomme en moyenne 3,29 kWh par semaine. 

Evolution selon les dates de sortie  

Sur les configurations maximales, on note une évolution de la puissance mesurée proportionnelle à la date de sortie de ces jeux. 

Jeux Sortie du jeu Puissance avec paramétrage maximal (W) 
War Thunder Novembre 2012 181,86 
Anno 1800 Avril 2019 214,94 
Borderlands 3 Septembre 2019 236,62 
Assassin’s Creed Valhalla Novembre 2020 249,46 
Total War Warhammer III Février 2022 257,70 

Dans ce contexte, les configurations maximales des jeux vidéo reflètent cette évolution technologique. Les développeurs de jeux conçoivent leurs jeux pour tirer parti des dernières avancées matérielles, ce qui se traduit par des exigences de plus en plus élevées sur les composants. Par conséquent, pour profiter pleinement des performances graphiques et de la fluidité de jeu, les joueurs doivent souvent investir dans du matériel informatique de pointe. 

Ces graphismes complexes et détaillés nécessitent un rendu en temps réel qui repose souvent sur le CPU pour effectuer des calculs liés à la physique, à l’intelligence artificielle des personnages non-joueurs, à la gestion des collisions et à d’autres aspects du gameplay.  

C’est ce qu’explique un directeur technique du jeu Total War dans une interview d’Intel :  

« Nous modélisons des milliers de soldats avec un niveau de détail élevé appliqué à chacun en matière d’animations, d’interactions, de décisions de pathfinding, etc. » 

Dans les jeux vidéo, le pathfinding consiste à trouver comment déplacer un personnage d’un point A à un point B en tenant compte de l’environnement : obstacles, autres personnages, longueur des chemins, etc.  

En outre, le processeur jongle souvent entre de nombreuses tâches simultanément en fonction de ce qui s’affiche à l’écran. « Prenons une scène où deux immenses fronts comptant des milliers de soldats se fracassent l’un contre l’autre, et où vous avez effectué un zoom assez rapproché » explique le directeur technique du jeu. « Dans cette situation, le processeur se partage principalement entre les combats basés sur des agents d’entité, les mécanismes de collision et la construction des piles de matrices afin de dessiner toutes les entités. »  

En d’autres termes, le processeur doit gérer simultanément la présence et les interactions de milliers de PNJ (personnages non joueurs). 

De plus, plus les graphismes sont avancés, plus le GPU est sollicité pour traiter les données et les instructions de manière efficace, ce qui peut entraîner des goulots d’étranglement et des ralentissements si le processeur n’est pas assez puissant. 

Sur le jeu Assassin’s Creed Valhalla, lorsque le paramétrage est au plus faible, la carte graphique est sollicitée à 46% en moyenne. A l’inverse, sur un paramétrage maximal avec par exemple les reflets sur l’eau activés ou la qualité des nuages maximale, la carte graphique est utilisée à 99% pendant le benchmark.  

Optimisation vs qualité graphique 

Nous venons de voir que le paramétrage d’un jeu réglé à son maximum implique de grosses consommations d’énergie. Cependant, les effets visuels en sont-ils améliorés ? Tous les paramètres sont-ils pertinents pour l’expérience de jeu selon la configuration du PC ? 

Un indicateur intéressant pour répondre à ces questions est le nombre d’images par secondes (FPS) car il est souvent utilisé comme indicateur de la fluidité d’un jeu : plus les FPS sont élevés, plus le jeu paraît fluide et réactif. 

Le FPS (Frame Per Second), c’est le nombre d’image par seconde indique le nombre d’images individuelles (ou « frames ») affichées à l’écran chaque seconde. 

En effet, plus une image est lourde à générer et afficher en fonction de sa complexité, moins le processeur et la carte graphique peuvent être rapides à les afficher. Ainsi, lorsque le paramétrage dépasse les capacités de la configuration du PC, l’effet visuel pour le joueur n’en est pas forcément amélioré. 

D’autant plus, le gameplay peut en être impacté par le phénomène de bottleneck. 

Le bottleneck ou goulot d’étranglement en français, c’est un phénomène produit par un composant matériel ou logiciel de performance limitée par rapport à d’autres composants plus performants. Cela signifie qu’une partie du système fonctionne à une capacité maximale, tandis que d’autres parties ne peuvent pas suivre, ce qui entraîne une baisse des performances globales. 

En équilibrant correctement la configuration matérielle et en ajustant les paramètres graphiques en conséquence, les joueurs peuvent minimiser les risques de ralentissements et de saccades, offrant ainsi une expérience de jeu plus agréable et immersive. 

Voici quelques différences de benchmarks réglés au maximum de leurs paramètres de jeu puis au minimum : 

Implications pour le matériel et impact environnemental 

L’évolution constante des jeux vidéo vers des expériences toujours plus immersives et réalistes a des implications significatives pour le matériel utilisé. Les développeurs de jeux cherchent à exploiter pleinement les capacités graphiques et de traitement des nouvelles technologies, ce qui se traduit par des exigences matérielles plus élevées. 

En France, l’année 2020 est marquée par la vente de 2,3 millions de consoles, 27,5 millions de jeux complets (Console + PC / physique + dématérialisé) et près de 7 millions d’accessoires (Console + PC). Avec une croissance de 10%, l’écosystème Console représente 51% de parts de marché total du jeu vidéo et le PC Gaming croît de 9%. (Source : Sell

Les joueurs cherchent à rester à la pointe de la technologie pour profiter pleinement des dernières sorties. Au-delà de l’enjeu financier que cela peut représenter, cette quête de performances matérielles est également très critique d’un point de vue environnemental. 

Nous l’avons vu, il faut que tous les composants d’une configuration soient environ au même niveau de performance pour bénéficier d’une expérience de jeu optimisée. Si le joueur possède une carte graphique très performante mais un écran de plus faible résolution, un processeur ou une carte mère moins puissants, l’expérience de jeu n’en sera pas forcément améliorée voire altérée. L’intérêt d’un point de vue optimisation n’est donc pas d’acheter des composants de dernière génération pour améliorer ses performances mais d’optimiser au mieux les paramètres du jeu selon la configuration de son matériel. Cela permet d’une part de rallonger leur espérance de vie avec une sollicitation moindre mais aussi en améliorant l’expérience de jeu pour les utilisateurs.  

La sur-sollicitation fait chauffer les composants comme la carte graphique ou le processeur à de hautes températures à cause de la quantité de calculs gérés par ces derniers et endommage leurs transistors et puces impliquant donc la réduction de leur durée de vie.  

La durée de vie d’un PC de bureau moyen dure entre 2 et 3 ans selon HP, et celle d’un PC gamer entre 3 et 5 ans

Nous n’avons pas d’informations au sujet de l’impact environnemental de la fabrication d’un PC gamer mais la fréquence de sortie tous les ans des produits dernière génération poussant les joueurs à renouveler tous les ans leur configuration de PC augmente considérablement l’impact de cette industrie. 

Il est à noter que les consoles de jeu ne sont pas en reste dans l’empreinte carbone. 

Ben Abraham, chercheur sur le climat et la durabilité, analyse l’unité centrale de traitement de la PlayStation 4 en utilisant la spectrométrie de masse, révélant la présence de composants atomiques comme le titane, dont l’extraction, le raffinage et la fabrication contribuent aux émissions de gaz à effet de serre.  

Cette observation souligne le défi de rendre durable la production de ces appareils, avec des décennies nécessaires pour atteindre cet objectif. 

L’importance de la mesure 

Les éditeurs de jeux vidéo jouent un rôle crucial dans la réduction de l’empreinte environnementale de l’industrie. Pour ce faire, il est impératif de prendre en compte les consommations d’énergie tout au long du processus de développement des jeux. 

Tout d’abord, mesurer les consommations d’énergie permet aux éditeurs de jeux de comprendre l’impact environnemental de leurs produits. Cela inclut non seulement la consommation d’énergie directe des appareils sur lesquels les jeux sont exécutés, mais aussi pourquoi pas l’empreinte carbone liée aux serveurs de jeu, aux mises à jour et téléchargements. 

Ensuite, cette prise de conscience permet aux développeurs de jeux de concevoir des mécaniques de jeu et des graphismes qui optimisent l’efficacité énergétique. Par exemple, en minimisant les effets visuels complexes qui nécessitent une puissance de calcul élevée, les jeux peuvent réduire leur consommation d’énergie tout en offrant une expérience de jeu immersive. 

Le sujet de l’empreinte environnementale des jeux vidéo est de plus en plus pris en compte par les éditeurs, ce qui est encourageant. Des initiatives telles que le Green Games Guide de l’Ukie ou celui de l’Ecran d’après offrent des conseils pratiques et des bonnes pratiques pour réduire l’impact environnemental de la conception et du développement de jeux. De même, des outils comme le Xbox Sustainability Toolkit de Microsoft ou Jyros, l’outil de mesure d’impact environnemental dédié à l’industrie du jeu vidéo en France, fournissent aux développeurs des moyens concrets d’évaluer et d’améliorer la durabilité de leurs jeux. 

Cependant, il est important de généraliser ces pratiques et de les intégrer de manière plus systématique dans l’ensemble de l’industrie. Trop souvent, l’aspect environnemental est relégué au second plan, tandis que l’accent est mis sur la performance et l’esthétique des jeux. Il est donc essentiel que les éditeurs prennent davantage en compte les implications environnementales de leurs décisions de conception et de développement. 

Limites de l’étude  

Dans le cadre de cette étude, il est important de reconnaître certaines limites qui pourraient affecter la portée et la représentativité des résultats obtenus : 

  1. Partenariat entre constructeur et concepteur : Il est possible que certains jeux vidéo aient établi des partenariats avec des fabricants de matériel informatique pour optimiser leurs performances sur des configurations spécifiques. Ces accords pourraient fausser les résultats du benchmark en favorisant certaines marques ou modèles de composants. Ces résultats peuvent altérer les comparaisons entre jeux, mais pas les comparaisons entre configurations d’un même jeu. 
  1. Scénario de benchmark pas forcément représentatif des modes de jeu : Les scénarios de benchmark utilisés pour évaluer les performances des jeux vidéo peuvent ne pas refléter les conditions de jeu réelles. Par exemple, un benchmark peut se concentrer sur des séquences spécifiques du jeu qui ne représentent pas nécessairement le gameplay général. Par conséquent, les résultats obtenus peuvent ne pas être entièrement représentatifs de l’expérience de jeu globale. 
  1. Pas de mesure du mode multijoueur ou du jeu en ligne : Cette étude se concentre principalement sur les performances des jeux en mode solo et ne prend pas en compte les aspects liés au multijoueur ou au jeu en ligne. Par conséquent, les échanges de données entre les serveurs de jeu et les clients, ainsi que les performances réseau, ne sont pas pris en compte dans l’analyse. Cela pourrait limiter la compréhension complète des besoins matériels pour une expérience de jeu en ligne optimale. 

Conclusion  

En conclusion, cette étude met en lumière l’impact croissant des jeux vidéo sur les performances matérielles des ordinateurs. Avec l’évolution constante des graphismes et des fonctionnalités, les jeux modernes exigent des configurations matérielles de plus en plus puissantes pour offrir une expérience de jeu optimale. Cela soulève des questions importantes sur la durabilité et l’efficacité énergétique des équipements informatiques, ainsi que sur les choix des consommateurs en matière de matériel. En fin de compte il est crucial, tant pour les éditeurs que pour les joueurs, de trouver un équilibre entre les performances des jeux vidéo et la durabilité de l’industrie technologique pour assurer un avenir plus durable. 

Exigences de sobriété numérique pour les villes et collectivités – édition 2024

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Contexte

Comme établi par la loi REEN (Réduction de l’Empreinte Environnementale du Numérique), les services publics devraient dès cette année être soumis à des obligations d’écoconception, décrites par le RGESN (Référentiel Général d’Écoconception de Services Numériques). La version finale de ce référentiel devrait sortir ces prochaines semaines. Il restera alors à attendre le décret d’application afin de connaître précisément ce qui sera attendu. C’est donc l’occasion idéale de proposer une nouvelle étude afin de remesurer l’ensemble des sites de l’étude de 2020 et de voir quelles tendances se dessinent.  

Même si nous n’avons pas encore la version finale du RGESN, celui-ci se dessine dans ses versions existantes comme un outil permettant de structurer une démarche d’écoconception, au-delà de l’estimation de l’écoconception d’un service numérique. Mesurer la page d’accueil d’un site ne permet en aucun cas de définir directement l’écoconception d’un site et encore moins sa conformité au RGESN. Toutefois, il s’agit toujours là d’une bonne première approche afin de se faire une première idée de la sensibilité de la structure au sujet de l’écoconception.  

Le RGESN est déjà utilisé chez Greenspector et nous partagerons ultérieurement nos recommandations concernant la place des mesures dans une démarche de mise en conformité au référentiel, notamment via la mise en place d’une démarche d’amélioration continue.  

Méthodologie

Les mesures initiales de 2020 ont été menées sur un smartphone Samsung Galaxy S7 sous Android 8.

Les remesures de 2022 (villes et métropoles) quant à elles ont été effectuées sur un smartphone Samsung Galaxy S9 sous Android 10. Les mesures ont été réalisées au travers de notre outil Greenspector Benchmark. 

Le scénario de mesure est le suivant :

  • Chargement de l’application 
  • Lecture du site web en premier plan 
  • Lecture de la page avec scroll 
  • Inactivité du site web en arrière-plan

Chaque mesure est la moyenne de 3 mesures homogènes (avec un écart-type faible). Pour chacune des itérations, le cache est préalablement vidé.

Différentes hypothèses ont été prises pour la projection environnementale : 

Pour plus de détails sur le calcul de l’EcoScore utilisé par Greenspector, se reporter à l’article dédié : https://greenspector.com/fr/comment-est-calcule-lecoscore-dans-le-cas-dun-benchmark-web-ou-mobile/ 

Limites

Cette année, il s’est avéré impossible de remesurer deux des sites de l’échantillon :

  • Ministère de la Santé 
  • Ministère du Travail  

Il faut noter que ces ministères ont été fusionnés à la suite du remaniement de début 2024 pour devenir le ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités. Les deux URL existantes pointent donc vers le même site, lequel présente d’ailleurs a priori quelques soucis d’optimisation côté Javascript (voir un article Linkedin que j’avais publié à ce sujet).

Le site https://corse.fr a disparu au profit du site https://www.isula.corsica/

Résumé des épisodes précédents

En 2020, nous vous avions proposé un premier article comparant les sites web de différentes collectivités

  • 29 Villes 
  • 21 Départements 
  • 12 Régions 
  • 18 Agences de l’État 
  • 16 Ministères 
  • 17 Métropoles 

Projection environnementale (gaz à effet de serre) par catégorie de site (2020) 

L’idée était d’établir un premier état des lieux. Les résultats étaient assez disparates (ce qui est habituel sur ce type d’étude), avec encore une belle marge de progression. Ainsi, nous avions donc un point de comparaison pour des études ultérieures.  

À la suite de l’arrivée de la loi REEN fin 2021, les communes et intercommunalités de plus de 50 000 habitants sont contraintes d’établir une stratégie autour du Numérique Responsable avant 2025. C’est donc tout naturellement que nous avons lancé en 2022 une nouvelle étude dédiée cette fois aux villes et métropoles

EcoscoreEnergieCPUDonnées (Mo)MémoireRequêtes HTTPImpact carbon (gEqCO2)Empreinte Eau (Litres)Empreinte sol (m2)
Moyenne générale mesure425,722,977,916721140,560,0740,693
Moyenne générale remesure585,651,317,14738920,510,0700,673
Evolution des moyennes pour un échantillon de villes et métropoles (2022) 

Et aujourd’hui ?

EcoscoreCPU (%)Mémoire (Mo)Énergie (mAh)Données (Mo)Requêtes HTTPImpact GES (gCO2)Impact eau (L)Occupation des sols (cm²)
Moyennes 202452,841,02851,145,465,1873,391,000,171,84
Moyennes 202046,582,81634,075,185,4799,341,300,222,42
Moyennes sur l’ensemble des sites au fil des mesures 

Pour 2024, nous avons donc choisi de remesurer l’ensemble des sites de 2020 : ministères, agences d’état, régions, départements, métropoles et villes. Ces remesures ont été lancées dans les mêmes conditions qu’en 2022 (mesures sur Samsung S9 plutôt que Samsung S7). 

L’EcoScore moyen pour l’ensemble des sites mesurés ici est passé de 46,58 à 52,84.  

Même si les métriques restent élevées, on note une amélioration entre 2020 et 2024.  

Alors que les structures publiques devront bientôt répondre à des obligations d’écoconception de leurs services numériques, il semblerait que des efforts restent nécessaires.  

Mais voyons tout ceci plus en détail.

Résultats obtenus

Le tableau compilant l’ensemble des résultats au cours des remesures effectuées cette année est présenté plus loin dans l’article. Commençons par examiner l’évolution par catégorie de sites.

Ministères

Pour les sites qu’il a été possible de remesurer en 2024, on constate l’évolution suivante : 

Évolution de l’EcoScore entre 2020 et 2024 

On constate une certaine disparité au niveau des scores mais aussi de leur évolution. Toutefois, dans le cas de l’Outre-Mer et de l’Enseignement Supérieur, la hausse est très importante (ce qui laisse imaginer une refonte complète de ces deux sites, ou en tout cas un remaniement conséquent). Nous les analyserons donc plus en détail par la suite.

Évolution des émissions de GES (gaz à effet de serre) entre 2020 et 2024 

On constate une tendance globale à la diminution des gaz à effet de serre, ce qui est une très bonne nouvelle. 

EcoscoreCPU (%)Énergie (mAh)Données (Mo)Requêtes HTTPImpact GES (gCO2)
Moyennes 202052,752,235,114,0794,671,28
Moyennes 202459,000,815,012,4149,080,87
Evolution des moyennes entre 2020 et 2024 

L’évolution des moyennes confirme une tendance globale à l’amélioration sur l’ensemble des métriques et indicateurs, ce qui est très encourageant.

Analyse rapide

Le site du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr) ainsi que celui du ministère de l’Intérieur et des Outre-Mer (https://www.outre-mer.gouv.fr/) montrent une amélioration significative de leur EcoScore (corrélée à une forte diminution de leurs impacts environnementaux).

Page d’accueil du site du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche 

Il apparaît que ces deux sites ont bénéficié d’une refonte par la société ISOBAR / Dentsu Creative, en s’appuyant sur Drupal.  

De façon malheureusement assez classique, les deux sites souffrent d’images insuffisamment optimisées (format et taille) ainsi que d’un manque d’optimisation des polices. Une fois ces optimisations mises en place et automatisées, il sera plus facile d’investiguer plus en détail pour trouver d’autres pistes d’amélioration.

Agences de l’État 

Entre 2020 et 2024, on constate l’évolution suivante :

Évolution de l’EcoScore entre 2020 et 2024 

Évolution des émissions de GES (gaz à effet de serre) entre 2020 et 2024 

Il y a là aussi une certaine disparité entre les EcoScores (et émissions de GES) mais aussi leur évolution.

EcoscoreCPU (%)Énergie (mAh)Données (Mo)Requêtes HTTPImpact GES (gCO2)
Moyennes 202051,942,754,403,4473,781,09
Moyennes 202453,671,175,595,0057,110,97
Evolution des moyennes entre 2020 et 2024

Si l’on constate une légère amélioration sur certains indicateurs, l’énergie et les données tendent à augmenter, ce qui devrait être évité. Plus particulièrement, nous sommes ici sur un échantillon assez restreint de sites (18 en tout). Les indicateurs trop élevés de certains (en particulier l’Institut National de la Consommation et le CEA) impactent donc fortement les moyennes obtenues. Surtout que, dans ces deux cas, l’augmentation des données transférées est conséquente (la valeur est doublée voire triplée par rapport à 2020).

Analyse rapide

La baisse de l’EcoScore apparaît particulièrement marquée pour le site de l’ANSM (https://ansm.sante.fr/). On remarque déjà un carrousel en défilement automatique dès l’affichage du site. Deux autres se trouvent plus bas sur la même page (ce qui est une mauvaise pratique tant pour les impacts environnementaux que pour l’accessibilité). La suppression (ou refonte) de ces composants permettrait dans un premier temps de réduire l’impact sur le CPU donc sur la batterie du terminal utilisateur, réduisant ainsi les impacts environnementaux.  

Les images sont plutôt légères. De même pour les polices de caractères mais les fichiers chargés sont trop nombreux.

Extrait des DevTools de Firefox, onglet Réseau 

Il semblerait que l’un des fichiers soit chargé 3 fois, ce qui devrait être évité. Plus généralement, il faudrait privilégier les polices système mais aussi éviter de charger les polices Google directement depuis leur site d’origine (risque lié au RGPD : https://gomakethings.com/google-fonts-and-gdpr/ [EN]). Pour ce qui est FontAwesome, il serait préférable de ne charger que les icônes réellement utilisées.  

Au passage, l’outil Wave relève d’ailleurs plusieurs erreurs d’accessibilité (boutons aux libellés non-explicites, images sans alternative textuelle, contraste de couleurs insuffisant, etc). 

Page d’accueil du site de Bpifrance 

Inversement, le site de BPI France (https://www.bpifrance.fr/) montre une amélioration notable. Ceci semble être lié à une refonte. Le site apparaît plutôt léger, même si (là aussi) les polices devraient être davantage optimisées (privilégier les polices système, éviter d’intégrer les polices Google depuis leur serveur d’origine, etc). Ici aussi, Drupal a été utilisé.  

Il semblerait qu’il y ait eu ici une vraie volonté d’écoconcevoir le site. Il aurait donc été intéressant de présenter une déclaration d’écoconception (ainsi que des éléments relatifs à l’accessibilité).

Régions

Entre 2020 et 2024, on constate l’évolution suivante :

Évolution de l’EcoScore entre 2020 et 2024 

La tendance pour l’EcoScore est globalement à l’amélioration, ce qui est une très bonne chose. Dans certains cas, cette amélioration est même très conséquente (Hauts-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes, Grand-Est et Bourgogne-France-Comté). Mention spéciale pour la région Bretagne qui obtient le meilleur EcoScore, du fait d’une démarche d’écoconception déjà bien entamée, notamment sur le portail de services (niveau Argent du certificat de sobriété Greenspector) mais aussi d’engagements pris dans le cadre du label Numérique Responsable de l’INR.

Évolution des émissions de GES (gaz à effet de serre) entre 2020 et 2024 

La tendance à l’amélioration, constatée avec l’EcoScore, se confirme ici avec notamment une réduction notable des émissions de GES pour la région Auvergne-Rhône-Alpes (ARA). Nous analyserons donc rapidement ce site par la suite.

EcoscoreCPU (%)Énergie (mAh)Données (Mo)Requêtes HTTPImpact GES (gCO2)
Moyennes 202042,083,365,466,48109,171,38
Moyennes 202455,580,875,172,8373,670,94
Evolution des moyennes entre 2020 et 2024 

L’évolution des moyennes confirme une tendance forte à l’amélioration sur l’ensemble des métriques et indicateurs, ce qui est très encourageant. Les résultats pourraient être encore meilleurs et il reste à voir si les gains obtenus sont plutôt liés à de la sobriété, de la frugalité ou de l’efficience. Dans tous les cas, ce pourrait être signe d’une démarche d’amélioration continue qui se met en place.

Analyse rapide

Si plusieurs sites montrent une amélioration notable de l’EcoScore, celui d’ARA (https://auvergnerhonealpes.fr/) est aussi celui pour lequel les émissions de GES diminuent le plus.

Page d’accueil du site de la région Auvergne-Rhône-Alpes 

On note plusieurs éléments très positifs sur ce site : son apparence plutôt sobre et son poids relativement faible. Il est regrettable que certaines images ne soient pas suffisamment optimisées, de même que les polices de caractères. Même si ces bonnes pratiques semblent déjà très répandues et totalement acquises par ceux qui s’intéressent à l’écoconception, leur adoption n’est malheureusement pas encore systématique. Vous pouvez trouver des éléments plus détaillés à ce propos dans le chapitre Sustainability du Web Almanac (en particulier ici : https://almanac.httparchive.org/en/2022/sustainability#image-optimization [EN]) ou dans celui consacré aux polices : https://almanac.httparchive.org/en/2022/fonts [EN] 

Là aussi, le site semble avoir été réalisé avec Drupal. S’il n’est pas garanti qu’un site créé avec Drupal respecte automatiquement toutes les bonnes pratiques d’écoconception, il est intéressant de noter ici que de plus en plus d’agences se tournent vers cette solution. Il est agréable de noter que les ressources sur les liens entre écoconception et Drupal se multiplient, même si la plupart sont aujourd’hui en anglais :  

Comme d’autres outils très utilisés, Drupal s’inscrit dans une démarche globale de réduction de ses impacts environnementaux (https://www.drupal.org/project/sustainability [EN]). 

Départements 

Entre 2020 et 2024, on constate l’évolution suivante : 

Évolution de l’EcoScore entre 2020 et 2024 

La tendance pour l’EcoScore est globalement à l’amélioration, avec des progrès significatifs sur certains sites (Seine-et-Marne, Val d’Oise, etc) mais aussi quelques dégradations qui peuvent étonner de prime abord (Rhône, Alpes-Maritimes). Nous creuserons cela de façon plus approfondie par la suite.

Évolution des émissions de GES (gaz à effet de serre) entre 2020 et 2024 

La tendance à l’amélioration, constatée avec l’EcoScore, se confirme ici avec une réduction notable des émissions de GES pour le site de la Seine-et-Marne et des Hauts-de-Seine. Inversement, ces émissions augmentent considérablement pour les Alpes-Maritimes et l’Essonne. 

EcoscoreCPU (%)Énergie (mAh)Données (Mo)Requêtes HTTPImpact GES (gCO2)
Moyennes 202048,052,855,186,2491,851,31
Moyennes 202451,300,955,557,8579,651,07
Evolution des moyennes entre 2020 et 2024 

L’évolution des moyennes reflète une amélioration des divers indicateurs, à l’exception de l’énergie et des données qui se dégradent.

Analyse rapide 

L’amélioration constatée pour le site de la Seine-et-Marne (https://seine-et-marne.fr/fr) est importante. Comme pour le site de Limoges (voir plus loin), l’éditeur est ici Stratis. Le site apparaît plutôt léger même s’il est regrettable qu’il ne soit pas davantage accessible. Lorsqu’on observe les requêtes effectuées, plusieurs éléments étonnants apparaissent : 

Extrait des DevTools de Firefox, onglet Réseau 

  • FontAwesome (police d’icônes) est utilisée mais il faudrait se limiter aux caractères véritablement utilisés sur le site. D’autant plus que les fichiers utilisés ne sont pas compressés côté serveur.  
  • De même, le fichier le plus volumineux est un fichier JS qui n’est pas compressé côté serveur et dont une bonne partie est probablement non-utilisées (ce qui est facilement vérifiable avec l’outil Coverage des DevTools de Chrome).  
  • Quelques images pourraient être davantage être optimisées, notamment en les convertissant au format WebP 
  • Le fichier HTML apparaît très volumineux.  

Analyse de la page HTML avec l’outil de DebugBear 

L’essentiel du poids du HTML correspond apparemment à des SVG (images vectorielles) intégrées directement à celui-ci. Si cette pratique permet de réduire le nombre de requêtes HTTP, elle risque ici de ralentir considérablement le chargement initial de la page, dans la mesure où le fichier HTML (que l’on récupère en premier) s’en retrouve bien alourdi.  

Il s’agit une fois de plus d’un site réalisé avec Drupal.  

La dégradation pour le site des Alpes-Maritimes (https://www.departement06.fr/departement-des-alpes-maritimes-3.html) est conséquente. 

Ce site apparaît très lourd (plus de 10 Mo pour l’ensemble de la page d’accueil). Là aussi, on retrouve des soucis d’optimisation sur certaines images ainsi que sur les polices (7 fichiers rien que pour la police Roboto). Certains gains pourraient être réalisés via la compression côté serveur.  

Plus généralement, il faudrait réduire le nombre de requêtes dont la majeure partie sont liées à des images. Ceci pourrait passer par une plus grande sobriété sur la page d’accueil, qui présente énormément d’éléments, peut-être trop pour que les utilisateurs s’y retrouvent facilement.

Métropoles 

Entre 2020 et 2024, on constate l’évolution suivante :

Évolution de l’EcoScore entre 2020 et 2024 

On remarque déjà que certains sites n’ont pas pu être systématiquement remesurés. 

Pour plusieurs sites, une amélioration notable était constatée entre 2022 puis une dégradation en 2024. Faute d’informations supplémentaires, nous ne pouvons que spéculer sur les causes : peut-être une refonte d’un site suivie d’une dégradation progressive ? Ceci semble souligner dans tous les cas une anomalie dans la démarche d’amélioration continue.

Évolution des émissions de GES (gaz à effet de serre) entre 2020 et 2024 

Les tendances observées pour l’EcoScore se confirment ici. En complément, les sites de la Métropole de Grenoble et celle de Metz bénéficient d’une réduction considérable de leurs émissions de GES entre 2020 et 2024.  

Il est intéressant de noter que celui de la métropole de Montpellier s’améliore au fil du temps, même si le résultat pourrait être encore meilleur.

EcoscoreCPU (%)Énergie (mAh)Données (Mo)Requêtes HTTPImpact GES (gCO2)
Moyennes 202044,602,635,465,36110,801,33
Moyennes 202258,471,375,727,5895,160,89
Moyennes 202451,381,105,536,2986,241,06
Evolution des moyennes entre 2020 et 2024 

L’évolution des moyennes reflète les constats effectués sur l’EcoScore : une amélioration significative en 2022 puis une nouvelle dégradation en 2024. Seules les requêtes HTTP et l’utilisation du CPU diminuent dans tous les cas, ce qui est une bonne chose.

Analyse rapide 

Le site de Metz Métropole (https://www.eurometropolemetz.eu/) s’est amélioré.  

Pour autant, tout n’est pas parfait. En arrivant sur le site, on découvre une vidéo en lecture automatique ainsi qu’une animation qui tourne en boucle sur le champ de recherche.

Visualisation de l’étape de pause après chargement de la page, Greenspector Studio 

Ces deux facteurs ont un fort impact sur le CPU du terminal utilisateur (la fluctuation est liée à la modification cyclique de l’affichage pour la vidéo et l’animation). De plus, ces choix de conception sont regrettables du point de vue de l’accessibilité.  

De façon assez classique, les images pourraient être davantage optimisées, de même que les polices (7 fichiers rien que pour la police Raleway).  

Les indicateurs du site de la métropole de Saint-Étienne (https://www.saint-etienne-metropole.fr/) se dégradent au fil du temps. Le chargement du site apparaît particulièrement long, en raison notamment de nombreuses images, certaines pesant plusieurs Mo (de façon analogue à ce qu’on avait pu constater en 2022 sur le site de la métropole de Montpellier). L’optimisation (de préférence) automatique de ces images permettrait d’obtenir des gains rapidement et facilement pour pouvoir ensuite aller vers d’autres problématiques (gestion des polices mais surtout sobriété).  

Notons qu’il s’agit là aussi d’un site Drupal mais où l’optimisation technique n’a pas été aussi poussée que pour d’autres sites vus précédemment.

Villes 

Entre 2020 et 2024, on observe l’évolution suivante : 

Évolution de l’EcoScore entre 2020 et 2024 

Comme pour les métropoles, on constate ici à plusieurs reprises une amélioration de l’EcoScore en 2022 puis une dégradation en 2024. Il sera intéressant d’effectuer les mesures plus régulièrement pour avoir une meilleure vision globale de leur évolution.

Évolution des émissions de GES (gaz à effet de serre) entre 2020 et 2024 

Les tendances observées pour l’EcoScore se confirment ici. On observe d’ailleurs quelques fortes diminutions des émissions de GES, notamment pour les sites des villes de Limoges, Annecy et Tours.

EcoscoreCPU (%)Énergie (mAh)Données (Mo)Requêtes HTTPImpact GES (gCO2)
Moyennes 202040,963,125,646,86116,921,45
Moyennes 202257,921,275,596,4192,130,88
Moyennes 202450,731,075,584,2577,121,01
Evolution des moyennes entre 2020 et 2024 

En définitive, si on compare 2020 et 2024, on constate une amélioration de l’Ecoscore mais aussi des autres indicateurs. Si l’on regarde l’EcoScore et les émissions de GES, le contraste est moins prononcé qu’entre 2020 et 2022. Toutefois, ceci souligne bien une tendance globale à l’amélioration.

Précisions 

Sur les villes et métropoles (qui sont les seuls sites à avoir été remesurés en 2022), on constate une amélioration entre 2020 et 2022 puis une dégradation forte entre 2022 et 2024.  

Plusieurs explications à cela :  

  • En 2020, les mesures ont été effectuées sur Samsung S7. En 2022, nous avons utilisé un Samsung S9. Le fait que ce soit un téléphone plus récent implique souvent une amélioration des métriques (téléphone plus performant). 
  • Entre 2022 et 2024, nous avons introduit un changement dans la méthodologie de mesure Greenspector pour le web. Jusque-là, l’étape de référence était mesurée sur un onglet vide de Chrome (onglet principalement blanc). Depuis, nous avons opté pour une étape de référence mesurée sur un onglet de Chrome contenant un fond entièrement noir. Ainsi, pour un écran OLED (comme celui du Samsung S9), la différence est significative et la note (en particulier pour les mesures liées à la décharge de batterie) diminue. Nous préparons à ce sujet une mise à jour de notre article sur l’impact de la couleur affichée sur la consommation énergétique paru en 2017 : https://greenspector.com/fr/faut-il-changer-son-fond-decran-pour-consommer-moins-de-batterie/  De plus, il n’est pas exclu que certains sites se soient dégradés entre 2022 et 2024 (ajout de contenus et autres aléas de la maintenance d’un site web).

Analyse rapide

Les émissions de GES liées au site de Limoges (https://www.limoges.fr/) ont grandement diminué, même si l’évolution de l’EcoScore est moins marquée.  

Ce site est lui aussi réalisé avec Drupal. Si certaines images pourraient être optimisées davantage, le poids le plus important correspond ici… aux polices de caractères ! Sur plus de 100 requêtes en tout pour afficher le site, une vingtaine correspondent à des polices de caractères. On note ici de nombreux doublons. Des subsets (suppression des caractères non-utilisés) pourraient être créés, notamment dans le cas de FontAwesome.

S’il est intéressant de découper les fichiers de code (notamment CSS) pour pouvoir les gérer plus finement, on compte ici plus de 30 fichiers CSS. Il serait préférable d’en avoir moins (ou en tout cas de ne charger que ceux dont l’utilisateur a réellement besoin).

Extrait de l’onglet Content de webpagetest. 

Synthèse des résultats

L’ensemble des résultats obtenus lors des mesures et de la projection environnementale pour 2024 sont présentés dans le tableau ci-dessous :

URLCatégorieEcoscoreCPU (%)Énergie (mAh)Données (Mo)Requêtes HTTPImpact GES (gCO2)
https://www.bas-rhin.fr/Département760,484,840,53220,74
https://www.nicecotedazur.org/Métropole710,615,170,64270,79
https://www.education.gouv.fr/Ministère690,544,882,27320,82
https://www.bpifrance.fr/Agence d'état680,724,731,51450,83
https://www.antai.gouv.fr/Agence d'état680,494,791,42470,76
https://www.ecologie.gouv.fr/Ministère680,555,092,31400,82
https://www.grenoblealpesmetropole.fr/Métropole680,564,930,84320,77
https://www.lillemetropole.fr/Métropole670,454,662,6320,82
https://www.grandlyon.comDépartement670,594,762,41710,85
https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/Ministère670,554,692,13300,85
https://www.bretagne.bzh/Région661,295,263,12560,94
https://www.laregion.fr/Région650,744,751,41260,8
https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/Ministère650,535,012,32400,84
https://www.gironde.fr/Département650,665,183,55340,83
https://www.valdemarne.fr/Département650,54,492,01700,83
http://www.bordeaux.fr/Ville640,524,530,62320,74
https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/Ministère640,555,11,02210,81
https://www.metropole-rouen-normandie.fr/Métropole640,74,962,35340,83
http://www.cstb.fr/Agence d'état640,524,892,64350,78
https://metropole.rennes.fr/Métropole620,84,952,03470,85
https://www.grandnancy.eu/accueil/Métropole620,624,713,09640,84
https://www.toulouse.fr/Ville620,735,251,93490,86
https://www.brest.fr/Ville620,574,863,19320,85
https://wwz.ifremer.fr/Agence d'état621,154,550,69340,78
https://www.metropolegrandparis.fr/frMétropole610,644,471,96840,84
https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/Agence d'état610,654,912,32490,85
https://www.iledefrance.fr/Région600,94,821,41400,79
https://www.seinemaritime.fr/Département590,575,12,6400,85
https://www.brest.frMétropole590,64,983,21320,91
https://anr.fr/Agence d'état590,475,051,73540,83
http://www.onisep.fr/Agence d'état590,825,333,31440,89
https://www.acoss.fr/Agence d'état580,665,235,88550,96
http://nice.fr/Ville580,824,948,27640,97
https://www.pole-emploi.fr/accueil/Agence d'état571,717,172,97400,74
https://www.toulouse-metropole.fr/Métropole570,795,231,94490,91
http://www.lemans.fr/Ville570,664,93,88830,97
https://www.lyon.fr/Ville570,825,261,87980,94
https://www.normandie.fr/Région570,625,294,13670,91
https://www.lehavre.fr/Ville570,714,824,24950,94
http://www.outre-mer.gouv.fr/Ministère570,915,057,66350,92
https://www.centre-valdeloire.fr/Région570,64,761,471450,91
https://www.amiens.fr/Ville560,915,332,21600,91
https://www.fonction-publique.gouv.fr/Ministère561,044,991,99540,83
https://www.auvergnerhonealpes.fr/Région560,895,212,92430,88
https://www.grandest.fr/Région560,725,212,42590,92
https://www.ecologie.gouv.fr/portail-mer/Ministère55150,7340,79
https://www.dijon.fr/Ville551,395,51,27640,9
https://www.lille.fr/Ville5515,964,51801,03
https://www.isere.fr/Département550,965,364,01640,97
https://www.reims.fr/Ville540,825,451,69620,96
http://www.justice.gouv.frMinistère541,064,771,14410,82
https://www.pasdecalais.fr/Département541,095,323,36510,89
https://www.mairie-perpignan.frVille540,885,2710,991401,19
https://www.ineris.fr/frAgence d'état540,895,114,38390,92
https://www.culture.gouv.fr/Ministère540,825,883,92541,02
https://herault.fr/Département540,585,165,34670,92
https://www.paris.fr/Ville541,516,353,35361,01
https://ants.gouv.fr/Agence d'état530,945,123,34380,89
https://www.rhone.fr/Département530,655,375,13690,95
https://agriculture.gouv.fr/Ministère530,994,592,24490,85
https://www.valdoise.fr/Département530,745,122,82650,89
https://www.bourgognefranchecomte.fr/Région530,694,941,891361,03
https://www.villeurbanne.fr/Ville520,964,983,48460,92
https://ansm.sante.fr/Agence d'état511,975,22,15410,88
https://www.businessfrance.fr/Agence d'état510,725,191,7730,91
https://lenord.fr/Département510,624,616,691001,01
https://www.yvelines.fr/Département510,695,322,5960,94
https://www.montpellier.fr/Ville510,654,83,95700,94
https://www.nouvelle-aquitaine.frRégion510,865,243,42510,92
https://www.tours.fr/Ville510,925,573,76480,93
https://www.orleans-metropole.fr/Métropole491,845,822,92410,99
https://www.saint-etienne-metropole.fr/Métropole490,865,4638,71151,72
https://www.hautsdefrance.fr/Région490,864,9131191,01
https://www.haute-garonne.fr/Département490,915,414,29530,92
https://www.maregionsud.fr/Région480,865,523,56490,94
https://www.metropole-dijon.fr/Métropole481,365,771,64670,99
https://www.seine-et-marne.frDépartement480,955,887,17991,01
https://www.clermontmetropole.eu/accueil/Métropole470,785,464,8790,99
http://www.angers.fr/Ville471,45,562,38660,98
http://www.aixenprovence.fr/Ville473,117,122,01251,11
https://www.marseille.fr/Ville471,25,778,021811,2
https://metropole.nantes.fr/Métropole470,95,418,99621,07
https://nice.fr/Ville471,565,7516,951631,31
https://www.economie.gouv.fr/Ministère461,165,061,251591,02
https://metropoletpm.fr/Métropole460,685,123,891771,08
https://www.onf.fr/Agence d'état452,645,732,56600,99
https://www.bordeaux-metropole.fr/Métropole441,335,662,12480,9
https://www.saintdenis.re/Ville440,985,684,1591,03
https://clermont-ferrand.fr/Ville441,055,654,94711,06
https://www.ugap.fr/Agence d'état431,336,519,92961,25
https://tours-metropole.fr/Métropole431,175,784,87911,07
https://www.inc-conso.fr/Agence d'état431,16,3619,44971,4
https://toulon.fr/Ville430,745,665,651491,12
https://seinesaintdenis.fr/Département411,35,526,89921,07
https://www.loire-atlantique.frDépartement411,225,663,63771,11
https://www.departement13.fr/Département411,326,156,82801,13
https://www.metzmetropole.fr/Métropole402,817,498,281351,46
https://www.grenoble.fr/Ville391,345,584,67701
https://meteofrance.com/Agence d'état382,046,935,46821,25
https://www.limoges.fr/frVille381,518,672,46931,43
https://www.annecy.fr/Ville371,555,714,641041,07
https://www.hauts-de-seine.fr/Département372,026,8811,861751,4
https://www.montpellier3m.fr/Métropole370,925,4120,482381,57
https://www.essonne.fr/Département361,827,1147,6962,06
https://www.strasbourg.eu/Métropole342,246,973,25911,19
https://www.nimes.fr/Ville341,115,9312,381281,24
http://www.cea.fr/Agence d'état322,277,8618,59991,62
https://www.departement06.fr/Département301,397,8127,841721,99
https://www.ampmetropole.fr/Métropole242,387,7613,592661,75

Pour les résultats antérieurs, se reporter aux articles précédents, identifiés en introduction de cet article. 

Perspectives et conclusion 

Il reste encore du chemin à parcourir pour rendre moins impactant les sites mesurés ici. Comme souvent dans ce type d’études, certaines recommandations faciles à implémenter pourraient constituer une bonne première étape. Il peut s’agir d’optimiser les images ou les polices, voire de limiter l’usage de certains composants animés. Dans tous les cas, une démarche d’amélioration continue doit être mise en place, notamment via des outils de mesure permettant de suivre l’évolution dans le temps. Ceci requiert de choisir soigneusement ce qui est mesuré, de quelle façon et à quelle fréquence, en s’appuyant si possible sur un budget environnemental. En complément, un référentiel de bonnes pratiques (le plus souvent construit à partir des référentiels existants) peut être d’un grand secours.  

Ceci coïncide avec un grand défi qui se profile pour les structures publiques françaises : mettre en œuvre le RGESN afin d’améliorer l’écoconception de leurs services numériques mais aussi plus généralement d’initier ou de renforcer leur démarche d’écoconception. Alors même que les efforts se multiplient autour de l’amélioration de l’accessibilité au regard du RGAA, les deux chantiers ne doivent pas être dissociés. En effet, l’accessibilité et l’écoconception sont deux domaines (parmi d’autres) du Numérique Responsable qui s’avèrent être à l’usage mutuellement bénéfiques.  

Si votre site n’apparaît pas dans ce classement ou si vous vous interrogez sur les résultats obtenus ou sur comment les améliorer, n’hésitez pas à nous contacter.  

Cybersécurité et écoconception quels sont les liens ?

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 Quel est le point commun entre des imprimantes, une voiture connectée et un avion de ligne ? 

La mise à disposition de terrains de jeux pour l’ingéniosité des cybercriminels qui exploitent les moindres failles de sécurité pour infiltrer les réseaux ou prendre le contrôle de nos systèmes les plus critiques. À l’image d’un baron de la drogue comme El Chapo qui s’échappe de sa prison de haute sécurité par l’endroit le moins sécurisé, les toilettes, un pirate informatique va toujours essayer de chercher la partie la plus vulnérable pour vous attaquer. Ces attaques pouvant être dramatiques pour la personne ou l’entreprise qui en est victime, il est donc nécessaire d’avoir une réflexion profonde sur ce sujet. 

Dans cet article, nous allons mentionner quelques histoires d’attaques informatiques étonnantes. Cela permettra de questionner nos choix d’implémentation de nouvelles fonctionnalités. En effet, ces mésaventures ont toutes une cause commune : l’augmentation de la surface d’attaque. 

La multiplication des points d’accès est un facteur de risque 

Ces dernières années, nous avons tous vu débarquer dans nos salons des objets communiquant avec l’extérieur. De l’assistant vocal connecté au thermostat intelligent, ces objets rendent des services plus ou moins utiles. Le monde de l’entreprise n’échappe pas à cette règle. Que ce soit dans les visions de l’industrie 4.0 ou tout simplement pour faciliter la communication à distance, ces systèmes connectés prennent une place de plus en plus importante. 

Malheureusement, certains appareils posent de grands risques. Alliant un faible niveau de sécurité et une connexion au réseau interne des entreprises, les objets connectés sont une mine d’or pour les individus malveillants. Et ils ne s’en privent pas. 

Dans son article, 01net montre comment un groupe de hackers russes s’attaquent aux objets connectés pour s’en prendre aux entreprises : https://www.01net.com/actualites/un-groupe-de-hackers-russes-cible-les-objets-connectes-pour-s-attaquer-aux-entreprises-1743886.html 

De plus, ces objets connectés ont souvent accès à des données privées. Imaginez qu’on puisse allumer votre webcam à distance ou avoir accès au micro de votre mixeur à soupe. Pire, imaginez qu’un individu malveillant prenne le contrôle d’un jouet pour enfant et s’en serve pour entrer en contact avec lui : https://www.france24.com/fr/20170228-hackers-ont-pirate-peluches-connectees-fait-fuiter-messages-denfants-a-leurs-parents   

La multiplication de ces objets pose un réel problème de société que nous ne pouvons pas ignorer. 

D’un point de vue environnemental, la diffusion de ces systèmes provoque également des impacts qui ne sont pas négligeables. De l’extraction des minerais jusqu’à leur distribution, la production des systèmes informatiques provoque des émissions de CO2 importantes, sans oublier bien sûr les autres impacts environnementaux comme la pollution des sols ou l’érosion de la biodiversité.

Pour toutes ces raisons, l’achat d’un nouvel appareil connecté ne doit pas être pris à la légère. Une question s’impose alors : Est-ce que nous en avons vraiment besoin ? 

Comment une fonctionnalité annexe peut se transformer en cheval de Troie ? 

Les nouveaux objets connectés ne sont pas les seuls systèmes qui peuvent être attaqués, les logiciels existants peuvent tout aussi bien l’être. 

Ce n’est pas non plus qu’une question de moyens. L’aviation, l’une des industries les plus puissantes financièrement et qui a mis des moyens importants dans la sécurité a aussi été victime d’actes criminels. 

Dans cet article, nous n’allons pas nous questionner sur l’intérêt de prendre l’avion, mais sur le sujet précis du divertissement à bord de ceux-ci. 

Les nombreux films et séries disponibles apportent des avantages indéniables pour les usagers : réduction de l’ennui, occupation des enfants, oubli du stress (et du fait que l’on soit dans un appareil qui brûle des milliers de litres de carburant par heure ) … 

Néanmoins, l’écran n’est pas un système totalement isolé du reste du monde. Par exemple, la coupure de la vidéo lors d’une communication du personnel implique nécessairement une communication entre le boitier et au moins une partie du reste de l’appareil. 

Et ce lien peut tout à fait servir de support à une attaque.  

Chris Roberts, un spécialiste de la cybersécurité, l’a bien montré en réussissant à modifier la puissance d’un réacteur en utilisant le système de divertissement : https://www.01net.com/actualites/un-hacker-aurait-pris-le-controle-d-un-avion-en-vol-grace-a-son-systeme-de-divertissement-654810.html 

Il est en réalité extrêmement difficile d’isoler totalement un système d’un autre.  

Cette histoire est un exemple parmi tant d’autres : 

– Voitures connectées : https://securite.developpez.com/actu/334250/Une-faille-dans-les-voitures-Tesla-permet-aux-voleurs-d-avoir-leur-propre-cle-et-de-s-emparer-de-la-voiture-en-seulement-130-secondes-l-exploit-tire-parti-du-lecteur-de-carte-NFC-des-voitures-Tesla/ 

– Fonctionnalité annexe de Facebook : https://tech.hindustantimes.com/tech/news/facebook-data-breach-what-is-view-as-feature-and-why-it-s-been-disabled-story-vpL6KmzapfYxZVwQBumNyI.html 

Cette dernière attaque est intéressante. Elle illustre en effet une philosophie bien connue des développeurs : “Pourquoi le faire ? Parce qu’on peut.” 

Des hackers ont profité d’une faille de sécurité dans un service du réseau social phare de Meta. La fonctionnalité en question permettait d’avoir un aperçu de la vision de son profil par un autre utilisateur. Certes, cela a un intérêt pour l’utilisateur, mais sans être indispensable en bon fonctionnement du réseau social. Les conséquences d’une attaque sont à l’inverse extrêmement préjudiciables à la fois pour les utilisateurs, mais aussi pour l’entreprise qui voit ainsi son image entachée. 

Lorsque le groupe s’est rendu compte de cette faille, ils ont immédiatement supprimé le service. Une question se pose alors : les utilisateurs ont-ils remarqué la disparition de la fonctionnalité ? 

D’un point de vue général, nous pouvons lister quelques inconvénients de la multiplication des possibilités offertes par un service numérique : 

  • dispersion des moyens qui auraient pu être alloués à la sécurisation des services clés de l’application ou du site web 
  • mise en place de fonctionnalités peu utilisées qui bénéficient d’une faible attention de la part de l’équipe de développement et donc d’une plus grande vulnérabilité 
  • nécessité de réduire la compatibilité avec les anciennes versions d’Android ou d’iOS. Et par conséquent de diminuer le nombre d’utilisateurs potentiels 
  • augmentation du poids d’une application dû au développement d’un plus grand nombre de code ou de médias embarqués. Augmentant ainsi l’impact environnemental de l’application 

En prenant en compte les risques associés, nous devons toujours nous demander : le confort que cela apporte vaut-il réellement les impacts que l’on provoque ? 

Il est également bon de rappeler que la cybersécurité fait partie intégrante du numérique responsable. En tant que concepteur de services numériques, il est par conséquent de notre devoir de protéger les utilisateurs. L’implémentation des mécanismes de sécurité est un élément important, mais une réflexion globale englobant l’ensemble des fonctionnalités est nécessaire. 

Les individus malveillants vont essayer de chercher dans tous les recoins de votre système pour s’y introduire. En massifiant le nombre de fonctionnalités, vous leur offrez de nouvelles portes qu’ils se feront un plaisir de forcer. 

Finalement, toutes ces attaques nous montrent que la sobriété de nos services numériques n’est pas uniquement un outil utile dans le cadre de la transition écologique du numérique, mais cette réflexion est intéressante également dans la lutte contre la cybercriminalité. 

Conclusion 

En résumé, la sobriété numérique se révèle être notre alliée inattendue dans le combat quotidien pour la sécurité informatique. Avant de se précipiter sur le nouvel objet à la mode ou la conception d’une fonctionnalité posons-nous les 2 questions suivantes :  

  1. Est-ce que c’est utile ? 
  1. Le risque vaut-il le bénéfice que cela m’apporte ? 

Dans certains cas, la réponse va bien évidemment être positive. La ceinture de sécurité alourdie la voiture, et donc augmente sa consommation d’essence, mais elle diminue fortement le nombre de morts sur les routes. La diminution du confort en valait la chandelle. 

Dans un grand nombre de cas, la réponse est au contraire négative. De nos jours, les voitures peuvent atteindre des vitesses dépassant largement les 150km/h. Pourtant, il est interdit de dépasser les 130km/h. Cette mesure, prise en 1974 pour lutter contre le choc pétrolier de 1973, a été le résultat de la mise dans la balance entre les libertés individuelles d’une part et d’autre part l’effort collectif a mener contre les conséquences du choc pétrolier. Le risque n’en valait pas la chandelle. 

Cette réflexion centrale de toute décision doit être au cœur des questionnements d’une équipe de développement. 

Aujourd’hui, uniquement la partie avantage d’une fonctionnalité est mise en avant. Mais est oublié : 

  • La sécurité des utilisateurs 
  • Le coût financier d’une attaque informatique 
  • La dégradation de l’image de l’entreprise qui subit une attaque informatique 
  • L’impact environnemental de cette fonctionnalité 
  • La perte de compatibilité avec certains utilisateurs 
  • Et bien d’autres encore… 

33 ans après l’obligation du port de la ceinture de sécurité à l’arrière, la question entre l’inconfort et la sécurité que cela apporte ne se pose plus dans le monde de l’automobile. Il faut que cela devienne également un réflexe des équipes de conception de services numériques dans le monde de l’informatique. 

Quelle est la corrélation entre écoconception et sobriété éditoriale ?

Reading Time: 4 minutes

Une démarche d’écoconception de services numériques ne peut réussir qu’en impliquant tous les acteurs du projet sur toutes les étapes du cycle de vie de celui-ci.
Parfois, malgré tous les efforts mis en œuvre pour appliquer les principes de l’écoconception lors de la réalisation d’un site web, les impacts environnementaux peuvent augmenter à cause d’éléments externes au périmètre défini. En particulier, il est indispensable d’embarquer celles et ceux qui vont produire du contenu sur le site. Pour cela, tout n’est pas si simple. Certaines bonnes pratiques peuvent être automatisées techniquement tandis que d’autres nécessitent de garder en tête l’ensemble des contenus proposés ainsi que leur pérennité.

Cet article propose des bonnes pratiques visant à faciliter la gestion des contenus dans une optique de réduction des impacts (environnementaux et autres) des contenus proposés.

Pour aller plus loin 

Le sujet a déjà été largement abordé par Ferréole Lespinasse : https://www.sobriete-editoriale.fr/  

L’agence Rose Primaire propose des checklists à ce sujet, qu’il s’agisse de publier sur un site web, un réseau social ou une newsletter : https://roseprimaire.com/checklists/

Le référentiel de l’INR (Institut du Numérique Responsable) propose une catégorie dédiée aux contenus : https://gr491.isit-europe.org/?famille=contenus  

De même pour le RGESN (Référentiel Général d’Ecoconception de Services Numériques) : https://www.arcep.fr/mes-demarches-et-services/entreprises/fiches-pratiques/referentiel-general-ecoconception-services-numeriques.html#c36438

Bonnes pratiques de sobriété éditoriale 

Intégrer le moins de contenu non-textuel possible 

Contexte  

Chaque contenu intégré va générer des requêtes et transferts de données. Il est donc important d’en intégrer le moins possible, tout en veillant à maintenir l’attractivité des publications.  Une fois qu’il ne reste que les contenus indispensables, il est nécessaire d’intégrer chacun d’entre eux de façon aussi efficiente que possible (voir plus loin).  

Le plus souvent, niveau impact : vidéo > podcast > image animée > image statique > texte   

Attention, les images animées de type GIF peuvent avoir une taille très conséquente et poser des problèmes d’accessibilité. 

Le MOOC de l’INRIA (Institut national de recherche en informatique et en automatique) propose une activité très simple pour comprendre ces impacts

Comment ?  

  • Limiter le nombre de contenus, en tenant compte de leurs impacts respectifs 
  • Éviter autant que possible les contenus purement décoratifs (par exemple, les images de stock ou carrousels) 
  • Garder en tête l’accessibilité  

Réduire le poids des vidéos 

Contexte  

D’autant plus à l’heure des réseaux sociaux, la vidéo est souvent privilégiée comme canal de communication.  

Aujourd’hui, la vidéo représenterait 60% des flux mondiaux de données.  

Comment ?  

Réduire le poids des fichiers audio 

Contexte  

Notamment avec les podcasts, les contenus audios se multiplient sur le web.  

Comment ?  

  • Privilégier les formats MP3, OGG ou AAC 
  • Utiliser des fichiers audios aussi concis que possible 
  • Plutôt que d’intégrer directement le contenu sur la page, intégrer une vignette cliquable menant à celui-ci 

Réduire le poids des images 

Contexte  

Au global, sur les pages web, les images sont à l’origine de la majorité des données transférées [EN].  

Comment ?  

  • Privilégier le format Webp et autres formats adaptés pour le web  
  • Proposer des images avec une taille et une qualité adaptée aux terminaux des utilisateurs 
  • Optimiser les images via un outil (exemple : Squoosh)  
  • Charger du texte par défaut et l’image seulement à la demande  

Tutoriel (en anglais) sur l’optimisation des images

Limiter l’impact des contenus tiers 

Contexte  

Il est facile d’intégrer des contenus provenant d’autres sites (vidéos Youtube/Dailymotion, messages ou fils Twitter/Facebook/Instagram/etc.).  

Leur intégration directe entraîne souvent de nombreuses requêtes (notamment des trackers) et données transférées.  

Comment ?  

Adopter une gestion sobre des publications 

Contexte  

Au-delà de la conception de chaque publication, il est important de garder en tête l’ensemble des publications disponibles. L’objectif ici est de garder du contenu pertinent et à jour. L’intérêt est d’éviter que le contenu ne soit noyé dans la masse, ce qui permet au passage d’améliorer le référencement naturel. 

Comment ?  

  • S’appuyer sur des indicateurs concrets : nombre de visites, nombre d’arrivées sur le site via cette page, taux de rebond, etc.  
  • Mettre à jour les publications plus anciennes qui restent intéressantes. Éventuellement en profiter pour changer le format : la vidéo devient un article  
  • Combiner les publications proches par leurs thèmes : des articles informatifs sont agrégés en un article de référence  
  • Supprimer les publications qui ne sont plus vues ou plus pertinentes (contenu obsolète ou relatif à des événements passés) 

Pour aller plus loin, il est également envisageable de :  

  • Définir une date d’expiration pour les publications créées (exemples : contenu chaud VS contenu froid, date de dépublication pour du contenu temporaire)  
  • Auditer les publications d’un site [EN] 
  • Publier le contenu de façon raisonnée et pertinente, notamment pour sa diffusion sur les réseaux sociaux et dans des newsletters. Ces dernières doivent elles-mêmes faire l’objet d’une démarche d’écoconception et de mise en accessibilité. Ce sujet pourrait à lui seul faire l’objet d’un article 

Proposer des libellés explicites pour les liens 

Contexte 

Lors de la navigation dans des contenus, il est fréquent de rencontrer des liens qui viennent enrichir le contenu en question. Afin d’éviter des mauvaises surprises pour les utilisateurs, les libellés de ces liens doivent être aussi explicites que possible. L’intérêt pour l’expérience utilisateur est évident mais il est également question ici d’éviter à l’utilisateur de charger du contenu qui ne lui est pas utile ou que son terminal ou sa connexion internet ne lui permettent pas d’utiliser dans de bonnes conditions. 

Les critères pour cette bonne pratique sont pour la plupart issus des règles OPQUAST (OPen QUality STandards). Il convient ici d’insister à nouveau sur la nécessité de proposer des liens (mais aussi plus généralement des contenus) accessibles. 

Comment ? 

Conclusion 

Nous avons évoqué ici ce qui peut être fait pour s’assurer de proposer du contenu aussi léger que possible. Si certaines actions reposent principalement sur les contributeurs, il est important à terme que les outils de gestion de contenu tels que les CMS (Content Management System) intègrent des outils pour assister les contributeurs. Il peut s’agir par exemple d’automatiser certaines optimisations techniques, de visualiser les impacts environnementaux du contenu produit mais aussi de faciliter la mise en place d’une démarche plus globale de gestion de contenu (expiration des documents, visualisation des consultations, etc.). Certains éditeurs ont déjà pris l’initiative d’entamer une telle démarche, il reste à espérer que celle-ci deviendra systématique. 

Le cadre législatif de l’écoconception de services numériques  

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En France, depuis plusieurs années, l’accessibilité des services numériques dispose d’un cadre législatif (amorcé dans l’article 47 de la loi 2005-102 du 11 février 2005 et précisé dans le décret n° 2019-768 du 24 juillet 2019). Celui-ci s’articule principalement autour du RGAA (Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité). L’écoconception de services numériques, discutée en France depuis plus de 15 ans, a pris un essor considérable ces dernières années. Pour autant, le sujet peine encore à s’imposer voire même à se dessiner de façon précise dans les structures. Le cadre législatif se précise depuis 2021 et devrait permettre ces prochaines années à l’écoconception de services numériques de s’imposer. L’objectif de cet article est justement de tâcher d’y voir un peu plus clair. 

Petit rappel d’usage 

L’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) et l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse) travaillent conjointement sur les impacts environnementaux du numérique. Leurs travaux couvrent notamment l’estimation de ces impacts à l’échelle de la France ainsi que les bonnes pratiques et perspectives. Ces éléments peuvent notamment être trouvés ici : https://www.arcep.fr/nos-sujets/numerique-et-environnement.html  

L’écoconception peut se définir comme une démarche d’intégration de la réduction des impacts environnementaux dès la conception d’un service numérique avec une vision globale sur l’ensemble du cycle de vie, via l’amélioration continue. 

Un service numérique est un ensemble de ressources humaines, logicielles et matérielles nécessaires à la mise à disposition d’un service.  

En conséquence (mais nous y reviendrons dans un article ultérieur), parler d’un site web écoconçu peut être perçu comme un abus de langage. Dans le cadre d’une démarche d’écoconception, il faudrait s’intéresser à l’ensemble des services numériques du site (ou a minima à un échantillon représentatif), via l’amélioration continue et en couvrant toutes les étapes du cycle de vie du projet. Tout ceci va donc bien plus loin que la simple mesure d’un échantillon de pages sur un site déjà en ligne.  

Les lois 

Pour la France, on distingue aujourd’hui principalement 2 lois : la loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire) et la loi REEN (Réduction de l’Empreinte Environnementale du Numérique). 

La loi AGEC aborde succinctement le sujet mais cette exigence ne semble pas avoir encore été traitée de façon exhaustive. Voir à ce propos le Guide pratique pour des achats numériques écoresponsables de la Mission interministérielle Numérique Écoresponsable. 

Même si certains éléments nécessitent encore d’être précisés, la loi REEN va plus loin en mentionnant (entre autres) :  

  • La nécessité de former à l’écoconception de services numériques les élèves ingénieurs dans des parcours liés au numérique. Mais aussi une sensibilisation à la sobriété numérique dès le plus jeune âge. 
  • La création d’un observatoire des impacts environnementaux du numérique, via l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) et l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse).  
  • Un référentiel général d’écoconception de services numériques pour fixer des critères de conception durable des sites web à mettre en œuvre dès 2024. L’ARCEP a depuis confirmé que ce référentiel se baserait sur le RGESN (Référentiel général d’écoconception de services numériques) : https://www.arcep.fr/actualites/actualites-et-communiques/detail/n/environnement-091023.html Une consultation publique, lancée en octobre 2023, a pour objectif de consolider ce référentiel et les pratiques autour de celui-ci afin d’élargir son adoption dès début 2024.
  • La lutte contre les différentes formes d’obsolescence ainsi que des actions en faveur du réemploi et de la réutilisation.  
  • Réduire les impacts des centres de données (notamment via le suivi de l’efficacité de la consommation d’énergie et d’eau) et des réseaux. Le décret est aujourd’hui en cours de publication
  • Imposer aux communes et groupements de communes de plus de 50 000 habitants d’établir et mettre en place une stratégie Numérique Responsable d’ici 2025. Cette stratégie doit notamment inclure des éléments relatifs à l’écoconception de services numériques. Des guides ont été publiés pour établir cette stratégie, en particulier celui-ci : https://www.interconnectes.com/wp-content/uploads/2023/06/web-Guide-methodologique_V8.pdf  

 Tout ceci s’accompagne de la mise en place du HCNE (Haut Comité pour le numérique écoresponsable), de différentes feuilles de route ainsi que d’une stratégie d’accélération numérique écoresponsable. Tout ceci est détaillé sur cette page : https://www.ecologie.gouv.fr/numerique-responsable 

Et maintenant ? 

Une fois tous ces éléments définis se pose la question de ce qu’il reste à faire.  

En 2024, la loi REEN imposera aux sites web publics d’être conçus de façon durable. En 2025, les collectivités de plus de 50 000 habitants devront avoir intégré cette dimension dans leur Stratégie Numérique Responsable.  

Greenspector est positionné depuis plusieurs années sur le sujet de l’écoconception de services numériques. Cette évolution du cadre législatif coïncide avec notre implication de plus en plus tôt dans les projets, parfois même dès l’expression du besoin. Ceci nécessite forcément de faire évoluer les pratiques, entre autres par la mise en place d’ateliers d’idéation prenant en compte l’empreinte environnementale d’un service. De plus en plus souvent, le RGESN sert de référence pour piloter la démarche tout au long du projet. Ce référentiel est idéal pour ce type d’accompagnement mais cela permet aussi de réunir des éléments permettant de piloter l’écoconception en tant que démarche d’amélioration continue.   

Cette façon de repenser l’accompagnement en écoconception de services numériques permet aussi d’aller vers des leviers plus importants de réduction des impacts et d’impliquer davantage de types de profils sur les projets accompagnés.  

Alors que la démarche s’amorce auprès d’institutions publiques, il reste à espérer que les entreprises suivront le même chemin. Certaines ont d’ailleurs déjà entamé les démarches de mise en conformité RGESN. Pas seulement par anticipation d’un éventuel changement de cadre législatif les concernant mais aussi parce que ce référentiel fournit un cadre à la démarche d’écoconception qui était attendu depuis longtemps.  

Afin de soutenir tous ces efforts, des aides financières sont disponibles, aussi bien pour les entreprises que pour les collectivités

Sur l’ensemble des sujets évoqués ici, la France a pris beaucoup d’avance. Il reste à en faire profiter les autres pays qui voudraient à leur tour s’engager dans une telle démarche. Le W3C (World Wide Web Consortium) a sorti en septembre ses WSG (Web Sustainability Guidelines). Elles sont désormais en consultation publique en vue d’avancer encore plus loin sur le sujet et peut-être à terme établir des standards pour le web. Elles s’accompagnent également de réflexions autour de la meilleure façon d’introduire des leviers directement au niveau des institutions. En Europe, certains se fédèrent autour de structures semblables à l’INR, notamment la Belgique et la Suisse. Il reste à espérer que le RGESN et autres éléments actuellement mis en place en France pourront être adaptés à d’autres pays. 

Le petit bout de la lorgnette – impacts environnementaux

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Il y a encore dix ans, le sujet des impacts environnementaux du numérique était limité à une poignée de spécialistes. Depuis quelques années, le sujet a pris beaucoup d’ampleur, notamment en France mais aussi à l’international. Alors que certains s’inquiètent (à juste titre) de la prépondérance des discours autour du net zero et de la neutralité carbone, cette tendance n’est qu’un symptôme d’une approche biaisée du sujet.  

Réduire une crise globale à un problème technique 

L’urgence climatique est un sujet essentiel qui a pris énormément d’ampleur ces dernières années. Le domaine du numérique n’est pas épargné et des études et outils ont permis à un grand nombre d’en prendre conscience. Le problème est alarmant mais aussi complexe et c’est pour cela que certains aspects se sont perdus en cours de route au profit d’une sensibilisation plus large.  

Dans le cas des services numériques, il est entendu qu’une ACV (Analyse de Cycle de Vie) est un excellent moyen d’estimer les impacts environnementaux mais la démarche peut s’avérer lourde et coûteuse. Définir le périmètre, sélectionner les indicateurs, recueillir et analyser les données. La complexité est d’autant plus difficile à prendre en compte quand on veut des résultats rapidement et de préférence qui soient faciles à communiquer. Alors, pour gagner en efficacité, certains font des choix en ne mesurant qu’une partie de leurs services numériques grâce à des outils faciles à prendre en main. En quelques clics, vous avez votre réponse et pouvez la partager.  

Cette logique vous semble familière ? Normal, c’est ce qu’on appelle le solutionnisme technologique, tel qu’exposé par Evgeny Morozov dans son ouvrage de référence “To save everything, click here”.  

C’est aussi pour cela que sont développées des solutions qui viennent analyser du code pour proposer des pistes d’amélioration afin de réduire les impacts environnementaux. Certains commencent même à s’appuyer sur de l’intelligence artificielle pour cela.  

C’est encore ce qui pousse certains à optimiser à quel endroit va être exécuté leur code pour aller vers une localisation où l’énergie est moins impactante d’un point de vue environnemental (en ne tenant bien sûr compte que des émissions de gaz à effet de serre). Et ce qui ne pourra pas être évité ou réduit pourra toujours être compensé.  

Tout ceci est au final très humain. Face à un problème complexe et urgent, on cherche à simplifier et à adopter ou trouver une solution rapide. Ce n’est pas une mauvaise chose pour autant mais il ne faut pas s’arrêter là. D’autant plus quand certains s’appuient sur des affirmations de “net zero” et de neutralité carbone pour dessiner artificiellement une ligne d’arrivée atteignable via des calculs savants et des investissements alors que le problème est systémique par nature.  

Le risque ici est d’optimiser un indicateur tout en en dégradant d’autres que l’on n’avait pas en tête (par exemple : solliciter un data centre présenté comme neutre carbone sans tenir compte de son impact sur les ressources en eau). Ainsi, on se demande de plus en plus si un site sobre est nécessairement moche sans se rendre compte qu’il n’est pas toujours accessible. Ni vraiment sobre, d’ailleurs.  

Rappel 

Les impacts environnementaux du numérique ne se limitent pas aux émissions de gaz à effet de serre. Comme on le voit dans l’ACV, les indicateurs à prendre en compte sont beaucoup plus nombreux et variés. Petit à petit, nous devons aussi prendre en compte la criticité de certaines ressources minières mais aussi celle de l’eau (comme on a pu le voir récemment avec ChatGPT et les data centres de chez Google).  

Les impacts environnementaux des services numériques ne viennent pas que du code. A vrai dire, d’après GreenIT.fr, seuls 20% environ des impacts viendraient du code. Ce qui est d’ailleurs tout à fait logique. Via le code, on va chercher à améliorer l’efficience (faire mieux avec moins). Les vrais leviers de réduction sont plutôt à chercher dans les autres étapes du cycle de vie, notamment la conception, la stratégie et la production de contenu. Ainsi, on pourra aller pour de bon vers la sobriété.  

Enfin, les impacts du numérique ne sont pas qu’environnementaux et c’est bien là le cœur du Numérique Responsable. Il faut garder en tête les impacts sur l’individu (via l’accessibilité, la sécurité, la gestion de données personnelles, l’économie de l’attention, l’éthique et l’inclusion). Ainsi, la gestion de l’urgence climatique ne peut se faire qu’avec une approche intersectionnelle.  

Comment faire ? 

L’approche technique n’est pas forcément mauvaise en soi. C’est une bonne chose d’avoir des solutions efficaces pour améliorer l’efficience des services numériques (pour peu que l’on garde en tête les éventuels effets de bord). Parfois, c’est même un excellent point de départ pour mener de premières actions, amorcer une démarche d’amélioration continue et débroussailler le sujet. 

Il est en revanche indispensable d’aller plus loin. C’est ce qu’on retrouve aujourd’hui dans des mouvements autour de la Sustainable UX ou de la communication responsable voire du marketing digital responsable, par exemple. On voit également émerger des ressources et ouvrages sur le “green service design” et sur le design systémique.  

C’est aussi ce qui fait que les 115 bonnes pratiques du collectif GreenIT ont pu évoluer au fil du temps et que d’autres référentiels plus complets ont pu voir le jour comme le RGESN et le GR491.  

Au-delà de cela, il est également important de se poser des questions plus générales sur ce qu’on écoconçoit mais aussi sur comment les services que l’on crée peuvent induire des comportements plus respectueux de l’environnement.  

Conclusion 

Comme nous avons déjà pu l’évoquer en étudiant les offres des hébergeurs web, la réalité des impacts environnementaux du numérique est plus complexe qu’en apparence. Le problème ne se résoudra pas en un clic et c’est peut-être tant mieux. En effet, c’est l’occasion de repenser le numérique, la façon dont on l’utilise et dont on le conçoit. De ces contraintes naîtra peut-être un numérique plus respectueux de l’environnement mais aussi des individus.  

Quelle empreinte environnementale pour les applications réseaux sociaux ? Édition 2023 

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Introduction 

Les usages et les fonctionnalités des réseaux sociaux se développent et leurs communautés ainsi que les moments de consommation sur nos écrans augmentent avec ces usages.
Les tendances, le marketing d’entreprise, les nouveaux canaux d’influence sont autant de facteurs de multiplication de connexion des utilisateurs et de leur temps d’utilisation.

Dans le Digital report France 2023 de We are social, on évalue à 92,6% les Français connectés à Internet. C’est une augmentation de +1% par rapport à 2022, soit 600 000 personnes, dont plus de 80,5% sont présents sur les réseaux sociaux.  
L’impact environnemental généré par les réseaux sociaux évolue avec l’augmentation du nombre de personnes et du temps passés sur les applications. Ceci implique un niveau de responsabilité plus fort sur ces services numériques massivement utilisés pour évaluer et réduire leurs impacts générés. Existe-t-il dans le monde un réseau social éco-responsable ? Comment “conscientiser” les éditeurs d’applications, peut-être même leurs utilisateurs ?  Pour cela, rien de tel qu’un petite mesure des consommations et de projection d’impacts pour répondre, humblement à ces 2 questions. 

Comme tous ces réseaux ne fonctionne pas de la même façon, nous avons choisi de remesurer un cas d’utilisation commun à tous, à savoir, le parcours et la lecture d’un fil d’actualité des 10 applications mobile de réseaux sociaux les plus utilisés en France.  

 
Méthodologie 

Choix des réseaux sociaux étudiés 

Les 10 applications de réseaux sociaux les plus populaires chez les Français sont : Facebook, Instagram, LinkedIn, Pinterest, Reddit, Snapchat, TikTok, Twitch, Twitter et Youtube. Nous avons repris les statistiques de We are social datant de janvier 2023 pour faire des projections d’impacts environnementaux. 

Compte tenu du cas d’usage sélectionné, nous avons privilégié les réseaux sociaux ayant un fil d’actualité, ce qui exclut des applications de messagerie, type Whatsapp, Messenger, Imessage, Skype, Discord et Telegram. Vous les retrouverez sans doute dans un prochain article 😉  

Définition du parcours utilisateur 

Nous avons fait évoluer le parcours utilisateur en réalisant un scénario de défilement du fil d’actualité comportant les étapes suivantes 

Etape 1 : lancement de l’application 
Etape 2 : lecture du fil d’actualité sans défilement (30 sec) 
Etape 3 : défilement du fil d’actualité avec des pauses intercalées.  
Etape 4 : mise en arrière-plan de l’application (30 sec) 

 
Ce parcours comporte un scroll de 2 secondes suivi d’une seconde de lecture (pause) le tout répété et pondéré sur une durée de 1 minute.  
 
Concernant Snapchat, son fonctionnement nous a obligé à considérer un scénario de clic et non de scroll, mais ne remettant pas en cause les temps de pause et de défilement de contenu. De plus, le fil d’actualité choisi est la page de stories, qui n’est pas la page d’accueil de l’application. Afin d’avoir des scénarios comparables, l’étape d’accès à la page de stories n’a pas été mesurée sur ce parcours et donc n’a pas été comprise dans l’impact généré.  
 
Les pauses lors du défilement du fil d’actualité simulent un comportement le plus réaliste possible de lecture. 
Ce parcours ne transcrit pas des usages les plus fréquents sur ces plateformes (lecture d’un post ou d’un contenu riche associé, d’une vidéo, réaction, échangé généré,  ….) mais il nous donne une indication sur le niveau de sobriété des applications. 

Pour cette étude, les données ont été mesurées via notre solution Greenspector Test Runner qui permet la réalisation de tests automatisés sur smartphone en local. 

Nous avons mesuré les consommations de ressources (énergie, mémoire, données) et les temps de réponse. Ces données nous ont ensuite permis d’obtenir l’impact environnemental des applications.  

Nous précisons que la méthodologie employée dans le cadre de cette étude compare uniquement le défilement des fils d’actualité les plus courants. Cela induit que la comparaison n’est pas forcément équivalente car certains fils d’actualité sont centrés sur du défilement de vidéos et d’autres sur des posts multimédia (texte, image, vidéo, gif animé, etc).  

Contexte de mesure  

  • Samsung 10, Android 10  
  • Réseau : Wi-Fi  
  • Luminosité : 50% 
  • Tests réalisés sur au moins 3 itérations pour fiabiliser les résultats 

Hypothèses retenues pour les projections environnementales 

  • Localisation utilisateurs : 100% France 
  • Localisation serveurs : 100% monde (à défaut d’avoir les informations pour chacune des applications) 
  • Appareils utilisés : 100% smartphone 
  • Type de serveurs : 100% complexes 

L’empreinte environnementale dépend de la localisation des serveurs de l’application, de leur type, de la localisation des utilisateurs et du type d’appareils qu’ils utilisent.  Nous avons pris le parti d’étudier l’usage des applications uniquement sur smartphone et sur la part des utilisateurs Français.  

Top et flop des applications les plus utilisées en France selon les résultats 

Le graphe ci-dessous classe les différentes applications de réseaux sociaux selon l’empreinte environnementale du parcours que nous avons défini plus haut.

L’application la moins sobre

Tiktok arrive en dernière position du classement sans grande surprise. En effet, l’application est très énergivore, elle consomme à son lancement 22,4 mAh et échange beaucoup de données pendant le défilement du fil d’actualité. Cet énorme échange est notamment dû au lancement des vidéos qui tourne en permanence et aux nombreuses publicités présentes sur l’application. 

L’application précharge de nombreux contenus, si l’utilisateur est hors connexion, il peut tout de même accéder aux vidéos. Tiktok charge pendant 30s après le lancement environ 5 Mo de données équivalents lors de ce test à 10 vidéos préchargées.  

L’application la plus sobre

LinkedIn est l’application la moins impactante selon nos résultats. Celle-ci n’échange qu’un très faible volume de données au chargement de l’application, ainsi que lors du scroll du fil d’actualité. Le fait que le réseau social soit axé sur le partage de posts textuels avec une faible quantité de photos et vidéos explique notamment ce score. De plus, LinkedIn consomme 13,9 mAh d’énergie, soit 15% de moins que les autres applications du panel.  

 

Les autres applications préchargent moins de contenus et souvent, moins volumineux. Une vidéo préchargée consomme plus d’énergie et génère plus d’échanges de données qu’un post de texte préchargé. 

Projection sur un an de l’impact des 2 applications les plus utilisées par les Français 

Toujours selon le rapport annuel de We Are Social, le temps passé sur les réseaux sociaux est en moyenne d’1h55 par jour. Quand on projette l’impact environnemental sur une année pour chaque application, l’impact environnemental représente de 20 à 40 kg eqCO2 selon le réseau social. Cela représente 185km en voiture pour le réseau le moins sobre. 

Selon le site de l’Ademe, Impact CO2 qui propose un convertisseur en ligne, environ 200g CO2eq = 1km. Sont incluses les émissions directes, la construction des véhicules (fabrication, maintenance et fin de vie) et la production et distribution de carburant et d’électricité. La construction des infrastructures (routes, rails, aéroports…) n’est pas incluse dans ce calcul.  

Nous avons choisi de comparer les 2 applications les plus utilisées par les Français à savoir Facebook environ 38,1M d’utilisateurs et Instagram qui compte environ 30,5M d’utilisateurs.

Facebook 

Le rapport énonce qu’en France, 52 millions de personnes sont présentes sur les réseaux sociaux. Facebook est le réseau social le plus populaire chez les 16-64 ans (73.3%). Si on multiplie l’impact environnemental de Facebook par le nombre d’utilisateurs français présents sur cette plateforme (env. 38,1M), cela représente plus de 24 tonnes eqCO2/min à son pic d’affluence (ou la production de 773 smartphones/min). Soit presque 1M de tonnes d’eqCO2 par an ! 

Instagram 

Instagram est le 2e réseau social le plus populaire chez les 16-64 ans après Facebook. Si on multiplie l’impact environnemental d’Instagram par le nombre d’utilisateurs français présents sur cette plateforme (58,6%), cela représente plus de 26,5 tonnes eqCO2/min (ou la production de 853 smartphones/min). Soit plus de 1,1M tonnes d’eqCO2 par an !  

On constate que malgré un écart de presque 8 millions d’utilisateurs, Instagram a un impact carbone supérieur à Facebook.  

Il convient de souligner que la durée consacrée aux réseaux sociaux varie en fonction du public concerné. Certains individus y consacrent moins de temps, tandis que d’autres y dédient considérablement plus, parfois jusqu’à 8 heures par jour.  

Le tableau ci-dessous projette l’impact carbone en termes de temps d’utilisation.

Et si on projette à l’international ? 

Pour une moyenne de temps passé sur les réseaux sociaux de 2 heures et 31 minutes tous réseaux confondus, nous faisons une estimation de la consommation de ces applications à l’échelle mondiale. 

Facebook compte 2,958 milliards d’utilisateurs à travers le monde ce qui fait de lui le réseau le plus populaire encore une fois. La consommation journalière d’un utilisateur passant en moyenne 2h31 sur ce réseau serait d’environ 95g eqCO2. Pour les presque 3 milliards d’utilisateurs de Facebook qui auraient une moyenne d’utilisation de ce réseau social de 2h31 par jour, la plateforme aurait une empreinte environnementale d’usage de plus de 281 000 tonnes eqCO2/jour soit plus de 102 millions de tonnes eqCO2 à l’année ! 

Au niveau international, Instagram compte environ 2 milliards d’utilisateurs. Par jour, la consommation d’un utilisateur qui passerait 2h31 sur Instagram produirait environ 132g eqCO2. À l’échelle des 2 milliards d’utilisateurs, cela représenterait 262 000 tonnes eqCO2/jour, soit près de 96 millions de tonnes à l’année. 
 

Et si on met un thème sombre ça donne quoi ? 

Nous avons réalisé nos mesures une seconde fois avec les applications en mode sombre pour pouvoir comparer les impacts énergétiques engendrés. 

Les mesures ont été réalisées sur un Samsung S10, détenteur d’un écran à technologie AMOLED, connue pour le fait qu’un pixel sombre sera en réalité un pixel partiellement éteint, ce qui explique que les modes sombres réduisent la consommation d’énergie. À contrario, lorsque l’écran utilise une technologie LCD, la couleur n’influence pas la consommation, expliquant pourquoi le mode sombre n’est pas plus économique en énergie que le mode clair, voir article ici.

RS visuel – 9

De nos jours, de plus en plus de téléphones sont dotés de la technologie d’écran AMOLED et il devient intéressant d’activer le mode sombre pour réduire sa consommation et ainsi préserver la décharge de la batterie. 

Lors de cette étude nous avons remarqué qu’uniquement 8 des 10 applications étudiées proposaient le dark mode. Snapchat et Tiktok ne le proposant pas, nous les avons exclus des mesures. Leur interface reposant sur du défilement de vidéos et photos uniquement, seuls quelques pages telles que la messagerie baisseraient la mesure de consommation d’énergie. 

On peut observer que l’activation du mode sombre entraîne une diminution de la consommation d’énergie mesurée sur la batterie. 

On peut constater que lorsque le dark mode est activé sur l’application, la consommation d’énergie est réduite en moyenne de 20%.  

Sur les applications comportant beaucoup de texte comme Twitter LinkedIn et Facebook, le mode sombre est plus économique en énergie car il inverse les couleurs d’un bloc de texte, devenant ainsi de fines écritures blanches sur fond noir. À contrario, les images et vidéos n’auront pas leurs couleurs inversées, il y aura donc peu de différences lors de l’affichage de contenu multimédia.

Bilan  

Pour cette étude, nous observons que l’impact en GES est environ deux fois plus important entre la plateforme la plus et la moins impactante.  

Les applications offrant beaucoup de contenu multimédia sont très consommatrices d’énergie et demandent de nombreux échanges de données sur le réseau pour afficher ces contenus. En revanche, les contenus textuels sont beaucoup moins lourds à charger ou énergivore.  

En conclusion, bien que les réseaux sociaux facilitent les échanges et l’accessibilité de l’information, ils ne sont premièrement pas totalement virtuels comme on pourrait le croire et posent la question de notre rapport à la consommation de ces applications. Les utilise-t-on réellement pour communiquer et pour une volonté de s’informer ou plutôt pour se nourrir d’une pluie d’informations et de contenu qui ne sont généralement pas désirés ou attendus ? 

À l’heure où l’urgence climatique est de mise, il est temps d’examiner notre rapport à nos écrans et d’adopter des gestes écologiques, de réduire le temps passé en ligne et d’activer le mode sombre sur les applications mobiles. 

Si vous êtes éditeurs d’applications, vous avez aussi votre rôle à jouer ! Voici quelques axes d’amélioration pour réduire l’impact : 

  • Mettez le mode sombre par défaut lors de téléchargement de l’application 
  • Évitez le pré chargement massif de contenu lourd 
  • Evitez les démarrages automatiques de vidéos ou le re-lancement automatique à la fin de vidéos 

Sources  

Pour les statistiques d’utilisation des réseaux sociaux :  

https://wearesocial.com/fr/blog/2023/02/digital-report-france-2023-%f0%9f%87%ab%f0%9f%87%b7/

Pour les équivalences en termes d’impact carbone :  

https://impactco2.fr/